Belgique. Faut-il interdire le parti “Islam” ?

Le petit parti Islam a présenté des éléments de son programme le 6 avril, en prévision des élections communales d’octobre prochain. Il y est question d’application de la charia et de séparation des sexes dans les transports en commun. Tollé dans la classe politique.

L’instauration d’un État islamique en Belgique, l’application de la charia et une séparation des hommes et des femmes dans les transports en commun : le parti Islam a présenté le 6 avril quelques axes de son programme et annoncé qu’il se présenterait dans 28 communes à Bruxelles et en Wallonie lors des élections communales d’octobre. L’un de ses cofondateurs, Redouane Ahrouch, a assuré à l’agence Belga que les musulmans seraient majoritaires à Bruxelles d’ici 2030 et qu’il était donc logique qu’un parti politique se charge de les représenter.

Avec ces annonces, le parti – fondé en 2012 et dont le nom est aussi un acronyme pour “Intégrité, solidarité, liberté, authenticité, moralité” – a “fait l’actualité” ces derniers jours, observe Le Soir. La classe politique a vivement réagi et plusieurs partis de droite ont soutenu qu’il fallait interdire Islam. Une idée débattue dans la presse.

“La prudence s’impose avant d’interdire un parti politique,tempère notamment Het Nieuwsblad, car les partis sont aussi un baromètre de ce qui agite la société. Les idées ne disparaissent pas subitement quand on interdit leur véhicule politique.” En outre, l’interdiction d’un parti est “plus facile à dire qu’à faire”,souligne le quotidien flamand qui a consulté un juriste, selon lequel il faudrait, pour ce faire, créer une nouvelle loi.

“Un petit parti marginal”

Dans son éditorial du 8 avril, Het Nieuwsblad cherche à ramener cette polémique dans des proportions réalistes – à ce stade, Islam ne compte que deux conseillers communaux, un dans la commune bruxelloise d’Anderlecht, l’autre dans celle de Molenbeek. “Un petit parti marginal, donc, mais visiblement assez important pour tirer toutes les figures de la politique flamande de leur trêve pascale.”

“Certes, les propositions de ce mini-parti sont répréhensibles et idiotes”, écrit l’éditorialiste.

Mais la question est de savoir si l’interdiction d’un parti est la meilleure façon de lutter contre des idées – si répréhensibles soient-elles.”

“Il n’y a que dans les dictatures que l’on interdit des opinions”, confirme De Standaard, estimant, exemple à l’appui, que cette mesure serait contre-productive : en 2004, le parti d’extrême droite Vlaams Blok a été condamné pour racisme, ce qui ne l’a pas empêché de remporter 24,2 % aux régionales flamandes, deux mois plus tard. Le parti s’est rebaptisé en Vlaams Belang (Intérêt flamand) et a continué sa route. Et s’il a fini par perdre du terrain, c’est parce que la N-VA (parti de droite, nationaliste flamand) est montée en puissance et a empiété sur son électorat.

“Je connais une façon de couper l’herbe sous le pied du parti Islam, conclut le chroniqueur du Standaard : mettre fin au racisme et à la discrimination sur le marché de l’emploi et de l’immobilier, ainsi que dans l’enseignement, afin que les musulmans se sentent acceptés et respectés”.

 

Courrier international

Fatima Achouri

Sociologue spécialiste de l’islam contemporain.

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