Dans le Sinaï, « c’est la guerre » entre l’Egypte et l’Etat islamique

  Carte de situation d’El-Arich, en Egypte.    Les djihadistes de l’État islamique ont battu en retraite, mercredi 1er juillet, après huit heures de violents combats contre l’armée égyptienne dans le Sinaï. Les affrontements avaient débuté par une série d’attaques coordonnées contre quatre points de contrôle et barrages routiers dans cette région désertique.

L’une des attaques, menée à l’aube avec une voiture piégée au sud de Cheikh Zouweid, près d’Al-Arich, chef-lieu du Nord-Sinaï, a coûté la vie à quinze soldats. « C’est la guerre », indiquait à l’AFP un haut responsable militaire plus tôt dans la journée.

Avant de se retirer, les djihadistes ont miné les abords d’un commissariat du Cheikh Zouweid pour empêcher l’arrivée de renforts, prenant position sur les toits des immeubles alentours pour attaquer le bâtiment avec des lance-roquettes, selon un colonel de police. Des chasseurs F-16 de l’armée ont alors bombardé les positions djihadistes, selon des responsables de la sécurité et un témoin. « Il y a des hommes armés dans les rues. Ils ont planté des mines partout », avait indiqué à l’AFP ce témoin depuis Cheikh Zouweid.

Bilan incertain

Au moins 70 soldats et civils ont été tués dans les violences, selon des responsables de la santé et de la sécurité. Mais dans un communiqué, l’armée a fait état de 17 soldats tués et de 100 djihadistes abattus, sans qu’il ne soit possible dans l’immédiat d’expliquer l’écart entre les différents bilans. Il s’agit quoi qu’il arrive des plus lourdes pertes subies par l’armée dans le Sinaï, bastion du groupe Ansar Beit Al-Maqdess, la branche de l’EI dans cette région.

Dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux, le groupe, qui s’est rebaptisé « Province du Sinaï » pour marquer son allégeance au « califat » autoproclamé par l’EI, a revendiqué des attaques contre plus d’une quinzaine de barrages militaires, précisant que trois kamikazes avaient participé aux assauts. Les djihadistes affirment d’ailleurs agir en représailles à la sanglante répression qui s’est abattue sur les pro-Morsi et qui a fait plus de 1 400 morts. Et les violences de mercredi interviennent alors que l’Égypte marque vendredi le deuxième anniversaire de l’éviction du président islamiste.

Au Caire, la police a mené, dans l’après-midi, un raid dans un appartement en banlieue, dans lequel neuf « activistes islamistes armés » ont été tués. Selon des sources sécuritaires citées par Reuters, les autorités avaient été informées du fait que le groupe préparait un attentat. L’un des morts serait Nasser Al-Hafi, ex-député et avocat des Frères musulmans du président déchu Mohamed Morsi.

Législation plus dure attendue

 Mardi, le président Abdel Fattah Al-Sissi a promis une législation plus dure pour « lutter contre le terrorisme », un terme qui, en Egypte, désigne notamment les Frères musulmans.     Cette offensive de grande ampleur des djihadistes dans le Sinaï a aussi eu lieu deux jours après l’assassinat au Caire du procureur général d’Égypte dans un attentat à la bombe. Il s’agit du plus haut représentant de l’État tué depuis le début de la vague d’attaques djihadistes en 2013. Il y a un mois, le groupe État islamique, qui n’a pas revendiqué ce meurtre, a appelé ses partisans à s’attaquer particulièrement aux juges, en réaction à la pendaison de six hommes reconnus coupables d’avoir perpétré des attaques au nom de l’EI.

Le président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi, l’ex-chef de l’armée tombeur de M. Morsi, avait promis lundi une législation plus dure pour « lutter contre le terrorisme ». Mercredi, le gouvernement a alors approuvé une nouvelle loi antiterroriste qui prévoit notamment « des procédures pour assécher les sources de financement du terrorisme » et doit « offrir une justice rapide et venger nos martyrs », selon un communiqué.

Une vaste campagne militaire a été lancée contre les djihadistes dans la région du Sinaï il y a près de deux ans, mais elle n’a pas réussi à mettre fin aux attentats. Selon les autorités, des centaines de policiers et soldats ont été tuées depuis. En avril, 14 personnes, en majorité des soldats et policiers, avaient ainsi péri dans deux attaques revendiquées par Ansar Beit Al-Maqdess dans le Nord-Sinaï, région frontalière d’Israël et du territoire palestinien de la bande de Gaza, alors qu’une autre attaque avait coûté la vie à 15 soldats et deux civils.

Le Monde.fr

F. Achouri

Sociologue.

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