Le grand imam d’Al Azhar plaide la cause de l’islam au Bundestag

Le grand imam s’est surtout livré à un intense plaidoyer en faveur de sa religion, innocente à ses yeux de ses dévoiements en Irak, Syrie ou Côte d’Ivoire.

Contre le « terrorisme » qui touche de nombreux musulmans, musulmans et non-musulmans doivent unir leurs efforts, a-t-il affirmé.

 

     Invité devant le Bundestag, le grand imam d’Al Azhar, Ahmed Mohammed al-Tayyeb, a remercié la chancelière Angela Merkel, mardi 16 mars, soulignant « sa position humanitaire vis-à-vis des émigrés qui avaient fui l’enfer et les malheurs de la guerre en Orient ».

Le grand imam s’est surtout livré à un intense plaidoyer en faveur de sa religion, innocente à ses yeux de ses dévoiements en Irak, Syrie ou Côte d’Ivoire. Contre le « terrorisme » qui touche de nombreux musulmans, musulmans et non-musulmans doivent unir leurs efforts, a-t-il affirmé.

« Je ne suis pas venu ici pour prêcher l’islam ou pour vanter ses bienfaits, mais pour solliciter votre objectivité afin de rendre justice à cette religion qui mérite que vous la défendiez contre l’injustice et les accusations, dont elle est innocente et qu’elle dénonce fermement », a-t-il demandé aux parlementaires allemands. « Dire que l’islam est une religion de combat ou d’épée est absolument faux, car, le mot, sayf, épée n’est pas un terme coranique et il n’y est pas mentionné dans le Coran ».

Programmes éducatifs

Citations du Coran ou hadiths à l’appui, la plus haute autorité de l’islam sunnite a affirmé que « l’islam n’autorise point à combattre le non-musulman à cause de son refus de l’islam ou d’une autre religion, car Allah a créé les mécréants et les croyants ». « L’histoire n’a pas enregistré un seul cas où les musulmans donnaient aux habitants des pays qu’ils contrôlaient le choix entre la conversion à l’islam et l’épée », a-t-il assuré.

Le chef d’Al Azhar a dit d’ailleurs sa disponibilité à fournir aux Allemands « des programmes éducatifs » susceptibles de protéger leurs jeunes contre les courants « déviants », et présentant l’islam comme une « religion pouvant être appliquée en tout temps et en tout lieu ».

 

« L’islam arrive même à reconnaître le mariage du musulman avec une chrétienne ou une juive en lui donnant le droit de garder sa confession. De même, le mari ne doit pas l’empêcher d’aller à son église ou à sa synagogue, ou de pratiquer les rituels de sa religion dans son foyer conjugal », a souligné Ahmed al Tayeb un peu plus loin.

Respecter les valeurs de leurs sociétés

Selon lui, le jihad en islam « ne se limite pas seulement au’combat’ » et « le jihad armé » n’est prescrit « que pour repousser les agressions et faire face aux guerres menées par leurs ennemis ». Quant à « la charia de l’islam, (elle) est basée sur les principes de la justice, de l’égalité, de la liberté et de la préservation de la dignité humaine. » Selon Ahmed al Tayeb, plusieurs lois et législations en Europe sont donc compatibles avec elle, « notamment celles qui assurent à l’homme sa dignité et sa liberté et lui garantit la justice et l’égalité, quelle que soit sa confession ou son ethnie ».

S’adressant ensuite à ses « frères musulmans qui vivent en Europe et font partie intégrante de son tissu national », le grand imam les a appelé à respecter « les valeurs supérieures de (leurs) sociétés et (à) donner une image positive de l’islam et de ses enseignements tolérants appelant à respecter l’Autre, quelles que soient sa religion, sa confession ou sa race ».

À charge pour leurs pays d’accueil de leur assurer « une vraie égalité (de traitement) avec les autres citoyens de souche »… « Vous ne devriez pas les laisser sentir toujours être des émigrants qui vivent en marge de la société tout en perdant toute loyauté à cette société à laquelle ils appartiennent », a-t-il lancé aux membres du Bundestag.

 

Au passage, il a également mis en garde les députés allemands contre l’idée fausse, selon lui, selon laquelle « la marginalisation dont souffre la femme orientale est due aux enseignements de l’islam ». C’est au contraire « la négligence des enseignements de l’islam » qui a conduit à minorer sa condition actuelle.

Deux poids, deux mesures

Ce vibrant plaidoyer en faveur de sa religion s’est assorti d’une interpellation des parlementaires allemands, et plus généralement européens, sur la cohérence entre leurs discours et leurs actes. Après avoir dit son admiration pour leurs « politiques basées sur l’égalité et la démocratie et la protection des droits de l’homme », il a aussi fait valoir que « nombreux sont ceux qui, en Orient arabo-musulman, ne trouvent dans la politique occidentale que celle des « deux poids, deux mesures », ainsi que celle des intérêts personnels ». « Les cas de l’Irak et de la Libye et d’autres pays en sont des exemples frappants », a-t-il asséné.

Des rumeurs – infondées de source vaticane – ont circulé, faisant croire à une possible rencontre à Rome entre le grand imam d’Al Azhar et le pape François pendant le week-end des Rameaux.

 

La Croix

F. Achouri

Sociologue.

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