Macron à l’écoute des juifs de France

À l’occasion du Nouvel an juif, le président Macron a présenté ses vœux à la communauté juive de France, le mardi 4 septembre à Paris.

Il n’a pas pris la parole au micro, mais a écouté les inquiétudes et demandes des responsables communautaires, qui s’alarment de la montée de l’antisémitisme et de l’islamisme radical.

C’est dans un climat particulièrement chaleureux, entre bains de foule, selfies et applaudissements, que le président de la République a été reçu par plus d’un millier de responsables de la communauté de juive de France, ce mardi 4 septembre au soir, sous les hautes et claires voûtes de la grande synagogue de la Victoire, dans le 9e arrondissement de Paris.

Après des premiers ministres et des ministres de l’intérieur les années précédentes, Emmanuel Macron était le premier chef de l’État à honorer un rendez-vous instauré en 2006, après l’assassinat d’Ilan Halimi : la présentation des vœux des pouvoirs publics à la communauté juive à l’occasion du mois de Tichri. Celui-ci marque le début de la nouvelle année hébraïque, et commencera ce dimanche 9 septembre avec la fête de Roch Hachana (littéralement « la tête de l’année »).

De Nicolas Sarkozy à Michel Boujenah

Outre les différents responsables communautaires, de nombreuses personnalités étaient au rendez-vous : ministres (dont le ministre de l’agriculture Stéphane Travert), parlementaires (dont le président du SénatGérard Larcher), ambassadeurs, élus locaux, mais aussi l’ancien président Nicolas Sarkozy, chaleureusement applaudi à son arrivée, ou encore des acteurs comme Michel Boujenah ou Francis Huster.

Le père Louis-Marie Coudray, chargé des relations avec le judaïsme à la Conférence des évêques de France, représentait l’Eglise catholique, tandis que l’évêque nommé de Nanterre, Mgr Matthieu Rougé, était présent à titre personnel.

A la déception d’une partie de l’assistance, le président Macron n’a pas pris la parole au micro, « se contentant » d’écouter les discours des trois orateurs : Joël Mergui, président du consistoire, Haïm Korsia, grand rabbin de France, et Michel Gugenheim, grand rabbin de Paris.

Les inquiétudes d’une communauté

Le premier a voulu lire dans ce silence une volonté de « préférer les actes à la parole » tandis que le deuxième est allé jusqu’à comparer Emmanuel Macron au mur des Lamentations de Jérusalem : « Nous lui confions nos peines et nos espoirs sans qu’il ne nous réponde, alors que nous savons bien qu’il nous entend ! »

Inquiétudes et préoccupations étaient en effet manifestes dans les différentes interventions : celles de voir l’antisémitisme se déployer sur les réseaux sociaux, par exemple, mais aussi la France devenir peu à peu une « terre d’exil »pour les juifs – qui la quittent notamment pour Israël –, après avoir été longtemps une « terre d’asile ».

 

Pointant « l’islamisme qui ronge notre XXIe siècle », Joël Mergui a fustigé sans ambages la « mauvaise conscience » qui pousse selon lui la société française à « tout accepter, tout pardonner, aux nouveaux damnés de la terre, parce qu’ils ont connu la misère et la colonisation ».

« Laïcité de repli », « laïcité généreuse »

Quelques instants plus tard, Joël Mergui a également déploré une certaine « laïcité de repli » qui, en croyant lutter contre l’islamisme radical, ferait des juifs de France des « victimes collatérales ». « Les juifs ne demandent aucun traitement de faveur, aucun privilège particulier, mais l’application rigoureuse des libertés individuelles », a-t-il énoncé, citant l’exemple de l’abattage rituel.

Haïm Korsia a quant à lui félicité le président pour la « laïcité généreuse » développée lors du dernier diner du CRIF, le 9 mars dernier – c’était le premier auquel Emmanuel Macron participait en tant que chef de l’Etat. Le grand rabbin l’a également remercié pour sa présence inattendue aux funérailles de Mireille Knoll, l’octogénaire juive tuée en mars à Paris.

Un voyage « prochain » en Israël ?

Parmi les demandes adressées à Emmanuel Macron, Haïm Korsia a surtout insisté sur la nécessité de la formation et l’éducation des jeunes citoyens, pour « extirper les racines de l’ignorance ».

Quant à Joël Mergui, il a réitéré une demande récurrente de la communauté juive : que le chef de l’État reconnaisse Jérusalem comme capitale d’Israël. Il a d’ailleurs signalé que le président Macron lui avait assuré qu’il se rendrait « prochainement » en Israël, sans plus de précision. Emmanuel Macron lui aurait également dit avoir à cœur de « soutenir et inaugurer » le futur centre européen du judaïsme. Celui-ci, en travaux dans le 17e arrondissement de Paris, pourrait ouvrir au premier semestre 2019.

 

La Croix

F. Achouri

Sociologue.

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