Islam de France : l’exécutif prêt à revoir le droit des cultes

Soucieux de mieux structurer l’islam de France, l’exécutif envisage de revoir le droit des cultes sans toucher aux grands principes de la loi de 1905.

 

Pourquoi la question des cultes refait-elle surface ?

Emmanuel Macron qui s’est engagé à mieux structurer l’islam a pris le temps de la réflexion sur ce sujet aussi complexe que sensible. Une consultation de tous les acteurs a notamment été conduite entre juin et fin septembre sous la houlette du ministère de l’intérieur. L’exécutif entre désormais dans la phase de concrétisation avec l’objectif de présenter son projet début 2019. Actuellement, un travail interministériel est mené par les spécialistes de l’intérieur, de la chancellerie ou de Bercy. Dans ce contexte, le journal l’Opinion a fait état, lundi 5 novembre, d’une réforme de la loi de 1905. « Un document de réflexion (…), rien d’autre que cela », a aussitôt tenu à relativiser le ministre de l’intérieur Christophe Castaner. La piste envisagée est néanmoins sérieuse, selon plusieurs bons connaisseurs du dossier.

► Quelle est la réforme envisagée ?

Difficile, du fait même du principe de séparation des Églises et de l’État, d’organiser l’islam contre son gré, par exemple en créant une taxe halal pour financer les lieux de culte. Le gouvernement semble donc privilégier une autre piste. Pour donner un cadre juridique à leurs activités, les confessions historiques recourent à la fois aux statuts associatifs de la loi de 1901 (pour un projet caritatif, culturel…) et de celle de 1905 pour les activités cultuelles (les associations diocésaines pour l’Église catholique).

Ce deuxième régime offre certains avantages, notamment fiscaux, mais il est plus contraignant, l’administration exerçant un contrôle financier. Pour cette raison, les communautés musulmanes y recourent peu. L’objectif du gouvernement serait donc de revoir sur ce point la loi de 1905 : le statut d’association cultuelle serait rendu plus attractif, ouvrant droit à de nouveaux modes de ressources ou de subventions. En contrepartie, l’administration se verrait conférer une forme de labellisation a priori des associations cultuelles.

► Tous les cultes seraient-ils concernés ?

Toutes les confessions seraient forcément concernées par une révision du régime des cultes. Lors de son intervention télévisée du 16 octobre, Emmanuel Macron avait d’ailleurs évoqué de façon lapidaire « une autre organisation des religions ». Le gouvernement consultera les représentants des cultes « dès la semaine prochaine » a précisé, lundi 5 novembre, la ministre de la justice Nicole Belloubet. La majorité assure qu’il s’agit d’opérer un toilettage technique de la loi de 1905 et non pas de toucher aux grands équilibres de ce texte.

Le député LREM Florent Boudié pilote depuis six mois un groupe de réflexion sur le sujet auquel participent une vingtaine d’élus. « Tout l’enjeu est de renforcer notre pacte laïc en l’adaptant à la nouvelle réalité religieuse du pays. Nous voulons à la fois apporter plus de transparence dans l’islam de France et donner aux musulmans modérés des outils pour mieux résister aux courants fondamentalistes. » Mais sur ce dossier où les mesures les plus techniques ont une portée politique, chacun attend les arbitrages précis du gouvernement. Hier, le député Les Républicains Éric Ciotti s’est montré réservé à l’idée de toucher à « un pilier porteur de notre République ». « Attention, la loi de 1905, c’est incendiaire », a aussi mis en garde le chef de file du mouvement Génération-s, Benoît Hamon.

 

La Croix

F. Achouri

Sociologue.

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