Le ministère de l’intérieur a annoncé mercredi 20 mars avoir demandé en conseil des ministres la dissolution des associations proches du Hezbollah et du régime iranien. Elle doit être formellement décidée par le président de la République.
Le ministère de l’intérieur a annoncé mercredi 20 mars avoir demandé en conseil des ministres la dissolution de quatre associations chiites, proches du Hezbollah et du régime iranien, qui « légitiment de façon régulière le djihad armé ».
Ces quatre associations, liées entre elles et mises en cause tant par les prêches que par les écrits mis à disposition des fidèles et des internautes, sont le « Centre Zahra France », la « Fédération chiite de France », le « Parti Anti Sioniste » et « France Marianne Télé », précise le communiqué. « Ce sont des associations ouvertement antisémites et dangereuses », a déclaré le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux, lors du compte rendu du conseil des ministres.
Leur siège à Grande-Synthe (Nord) avait été visé le 2 octobre 2018 par une opération antiterroriste. Les perquisitions administratives avaient permis la découverte d’armes à feu détenues illégalement. Dans la foulée, le trésorier du Centre Zahra France a été condamné à 18 mois de prison, dont six fermes, par le tribunal correctionnel de Dunkerque pour détention illégale d’armes. Et son lieu de culte a été fermé le 15 octobre pour une durée de six mois par la préfecture du Nord.
Formé par le Hezbollah au Liban
Le Centre Zahra France tire son nom de celui de Fatima Zahra, la fille du prophète de l’islam et de sa première femme, Khadija, épouse d’Ali, quatrième calife pour les sunnites et premier des imams pour les chiites.
Les quatre associations visées tournent autour d’une même personnalité : Yahia Gouasmi, un Franco-Algérien âgé de 70 ans. Boucher halal à son arrivée en France, il s’est converti au chiisme. Selon le spécialiste de l’extrémisme musulman Romain Caillet, il est parti se former dans les haouza (écoles religieuses) du Hezbollah au Liban. Des photos témoignent de ses rencontres régulières avec Mohamed Yazbek, fondateur du Hezbollah au Liban.
Le ministère de l’intérieur reproche aux associations logées par le Centre Zahra« un endoctrinement de la jeunesse (…) dans la perspective de la guerre sainte et d’une apologie constante, notamment via Internet, des actions d’organisations telles que le Hamas, le Djihad islamique palestinien et la branche armée du Hezbollah ».
Liste aux Européennes en 2009
« Au départ, son mouvement se contentait d’être pro-Hezbollah et pro-iranien, sans toutefois intervenir dans le champ politique français », précise le spécialiste. Pour Romain Caillet, deux éléments ont joué dans cette décision de fermeture.
D’abord l’activisme croissant du Centre Zahra France dans l’espace public, avec la rencontre de Kemi Seba, le fondateur de « Tribu Ka » et « Génération Kémi Séba » (toutes deux dissoutes pour incitation à la haine raciale), puis de Dieudonné. En 2009, le Parti Anti-sioniste de Yahia Gouasmi a été jusqu’à présenter une liste aux élections européenne avec le renfort de ce dernier.
De fait, le compte Twitter de cette organisation (officiellement « Centre de conciliation pour la mémoire de l’Homme ») est une litanie de vidéos apologétiques, mais aussi de diatribes contre le sionisme et l’État d’Israël et de déclarations de soutien aux gilets jaunes.
Durcissement américain
Second facteur déclencheur de la fermeture : le Hezbollah, créé en 1982 par les Gardiens de la révolution iraniens dans la foulée de l’invasion israélienne du Liban, a été placé par l’Union européenne sur la liste des organisations terroristes en 2013 en raison de son implication dans une attaque kamikaze contre des touristes israéliens à l’aéroport de Bourgas en Bulgarie. Le 30 juin 2017, c’est sur le sol français, à Villepinte (Seine-Saint-Denis), qu’un attentat a été déjoué contre un rassemblement des Moudjahidines du peuple, groupe d’opposition iranien.
« En raison du durcissement américain contre le régime iranien, les pays occidentaux alliés des États-Unis craignent que l’activisme iranien augmente sur leur sol », analyse Romain Caillet, pour qui le « timing paraît logique ».
« Nous prenons acte de votre aliénation au sionisme et de votre guerre ouverte aux antisionistes Français, a réagi le dirigeant du Centre Zahra France sur Twitter. Nous prenons acte de votre déclaration de guerre au Centre Zahra, à l’islam, au chiisme et à la liberté de culte. »
La dissolution doit désormais être formellement décidée par le président de la République.
La Croix