Bio et halal ne font pas bon ménage selon plusieurs associations œuvrant pour le bien-être animal. Le label « agriculture biologique » (AB) ne peut être apposé sur les viandes issues d’animaux abattus sans étourdissement préalable. Le Conseil d’Etat a rendu un arrêt en ce sens en toute fin d’année 2020, au grand dam de la société Bionoor qui commercialisait des produits carnés flanqués du logo AB.
Dans l’arrêt rendu par le Conseil d’Etat, la cour administrative d’appel de Versailles, qui avait annulé en juillet 2019 le jugement en première instance rendu en janvier 2016 par le tribunal administratif de Montreuil en faveur de Bionoor, « n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que l’exclusion des produits issus d’animaux ayant été abattus sans étourdissement préalable du champ d’application du logo de production biologique de l’Union ne créait aucune discrimination contraire aux stipulations combinées des articles 9 et 14 (posant les principes de liberté de conscience et de culte ainsi que celui de non-discrimination, ndlr) de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales », lit-on.
Un avis juridique européen à l’appui du verdict français
La CJUE, statuant sur la question préjudicielle qui lui avait été soumise par la cour administrative d’appel, « a retenu que l’apposition du logo de production biologique de l’Union européenne, qui caractérise l’observation de normes renforcées en matière de bien-être animal à tous les stades de la production dans le cadre de l’agriculture biologique, n’est pas autorisée pour des produits issus d’animaux ayant fait l’objet d’un abattage rituel sans étourdissement préalable, selon la forme d’abattage autorisée à titre dérogatoire uniquement afin d’assurer le respect de la liberté de religion, car ces produits n’ont pas été obtenus dans le respect des normes les plus élevées en matière de bien-être animal au moment de la mise à mort des animaux », rappelle le Conseil d’Etat dans son arrêt.
« L’utilisation par la société Bionoor de ce logo étant dès l’origine dépourvue de base légale, la cour administrative d’appel de Versailles n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que l’exclusion des produits de cette société du bénéfice de ce logo ne créait aucune discrimination contraire aux stipulations combinées de l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de l’article 14 de cette convention », posant le droit de propriété et le principe de non-discrimination, fait savoir la plus haute juridiction administrative en France.
Pour Bionoor, l’alternative avec AVS Nature
Cette certification « garantit que les produits carnés sont issus d’animaux ayant bénéficié de l’application de ces normes de leur vivant, hors abattage, puis abattus rituellement sans étourdissement préalable », avait indiqué AVS au lancement de sa certification en novembre 2019.
Parmi les normes, figurent le fait que les animaux aient « accès à un parcours extérieur », qu’ils disposent chacun « d’un espace aéré, de lumière et d’une surface minimum, paillée à l’intérieur des bâtiments, lui permettant de se mouvoir librement », qu’ils soient « nourris avec une alimentation bio adaptée à l’animal et ne comprenant pas de matières premières OGM » ou encore que la santé des animaux soit « axée principalement sur la prévention, avec des méthodes et conditions d’élevage privilégiant le bien-être de l’animal et stimulant les défenses naturelles ». Par ailleurs, « les produits chimiques de synthèse tels les pesticides sont interdits » et « le personnel chargé des animaux possède les connaissances et les compétences élémentaires nécessaires en matière de santé et de bien-être des animaux », indique-t-on.
Mais AVS, qui défend une vision du halal interdisant l’abattage des animaux sans étourdissement préalable, pourra-t-il encore le faire dans les années à venir en France ? La question mérite d’être posée. Dernièrement, la CJUE a estimé qu’imposer l’interdiction de l’abattage rituel sans étourdissement préalable est possible au nom du bien-être animal sans qu’elle n’entrave la liberté de culte.