A Gaza, c’est « l’Aïd du sang »

Netanyahu appelle ses concitoyens à se préparer à « une longue campagne ».

 

Le conflit entre Israël et le Hamas a connu une dramatique escalade lundi après la mort d’enfants palestiniens et des attaques meurtrières contre l’armée israélienne, suivies d’incessants bombardements à Gaza annihilant tout espoir de trêve à l’occasion de la fin du ramadan.

« Au nom de l’humanité, la violence doit s’arrêter », a exhorté le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-Moon, tandis que les principaux dirigeants occidentaux, dont Barack Obama, ont affirmé leur volonté « d’augmenter » la « pression » pour parvenir à un cessez-le-feu.
Le président américain avait déjà réclamé la veille une trêve « immédiate et sans conditions » au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. Mais ce dernier a au contraire promis lundi « une longue campagne » contre le Hamas dont Israël entend annihiler la puissance de feu. « Nous devons être prêts à une longue campagne jusqu’à ce que notre mission soit remplie », a affirmé le Premier ministre lors d’une allocution télévisée. « On ne terminera pas cette opération sans avoir neutralisé les tunnels » qui servent au mouvement palestinien Hamas pour attaquer Israël, a souligné M. Netanyahu.
De fait, dans le secteur de la ville de Gaza, les bombardements étaient intensifs lundi soir, ont constaté des journalistes de l’AFP. Selon un premier bilan des secours locaux à 22H00 (19H00 GMT), ils ont tué quinze Palestiniens, dont trois enfants, dans tout le territoire.
Plus tôt à Gaza, huit autres enfants ainsi que deux adultes sont morts dans le camp de réfugiés de Chati, les deux parties se renvoyant la responsabilité de cet énième drame sanglant d’une guerre déclenchée le 8 juillet.
Selon des témoins, de chasseurs F-16 israéliens ont lancé 5 missiles sur un groupe d’enfants. L’armée israélienne, elle, pointe du doigt des tirs de roquettes ratés par le camp adverse, tout comme pour une explosion survenue, sans faire de victime, dans l’enceinte de l’hôpital Chifa à gaza, qui faisait jusqu’à présent figure de rare sanctuaire.
Un autre enfant, âgé de quatre ans, avait péri à la mi-journée dans un tir de char à Jabaliya (nord).

Selon les services de secours, 1.079 Palestiniens -pour plus des trois-quarts des civils selon l’ONU et plus de 230 enfants- ont été tués depuis le début de l’opération et 47 corps ont été amenés dans les morgues de l’enclave lundi : ceux de 31 Palestiniens tués lors de frappes durant la journée, 12 tirés des décombres et les corps de 4 Palestiniens ayant succombé à leurs blessures. L’offensive israélienne a également fait quelque 6.200 blessés dans la bande de Gaza, où les destructions sont considérables.

Israël a aussi enregistré de lourdes pertes lundi. Quatre de ses soldats ont été tués par un tir de mortier le long de la frontière avec l’enclave palestinienne, selon l’armée. Les médias israéliens avaient d’abord fait état de victimes civiles. Cette attaque a été revendiquée par le Hamas. Un cinquième militaire est tombé au combat à Gaza.
L’armée israélienne a encore annoncé avoir tué un membre d’un commando palestinien qui s’était infiltré près du kibboutz de Nahal Oz (sud), tout proche de la frontière. Le Hamas a aussi assumé la responsabilité d’une opération dans la région, disant avoir tué « plus de 10 soldats », ce que l’armée n’a pas commenté.

Israël a perdu en tout 48 soldats, le bilan le plus lourd depuis la guerre contre le Hezbollah de 2006.
Trois civils ont été tués par des tirs de roquettes ou d’obus de mortier.

 

Sinistre fin du ramadan
L’accalmie qu’ont connue dimanche et dans la nuit les Gazaouis aura donc été très éphémère. Elle n’avait d’ailleurs pas éteint leur hantise des bombardements, à en juger par le calme inhabituel des rues de gaza quelques heures avant la célébration de la fête du Fitr marquant la fin du ramadan, qui s’annonce sinistre pour les 1,8 million d’habitants.
« C’est l’Aïd du sang », résumait Abir Chamali en passant doucement la main sur la terre fraîche qui recouvre le corps de son fils de 16 ans tué jeudi près de la ville de gaza.
« L’occupant (israélien) refuse toujours tout cessez-le-feu humanitaire pour l’Aïd. Il s’agit d’une rebuffade aux croyances des musulmans et à leur culte », a accusé le porte-parole du Hamas à Gaza, Sami Abou Zouhri.
A New York, les 15 pays membres du Conseil de sécurité de l’ONU, réunis en urgence, avaient exprimé avant la reprise massive des hostilités, leur « fort soutien à un cessez-le-feu humanitaire immédiat et sans conditions » réclamé par Barack Obama. Cette déclaration unanime a été fraîchement accueillie. Le représentant palestinien à l’ONU Ryad Mansour a regretté que le Conseil n’ait pas appelé à la levée du blocus imposé depuis 2006 à Gaza, tandis qu’Israël jugeait qu’il n’avait pas pris en compte les impératifs de sécurité d’Israël.

Le président palestinien Mahmoud Abbas, qui était dimanche en Arabie saoudite, devrait se rendre « très bientôt » à la tête d’une délégation de son mouvement le Fatah, du Hamas et du Jihad islamique, pour discuter d’un cessez-le-feu, au Caire qui a condamné « l’usage excessif de la force » par Israël. Même si une très hypothétique trêve devait être finalement arrachée, sur le fond, les désaccords resteraient profonds sur les termes d’un accord durable.

Appuyé sur le fort soutien de son opinion publique, Israël entend finir de neutraliser les souterrains creusés à gaza pour dissimuler des armes et lancer des attaques en territoire israélien.
Et le secrétaire d’État John Kerry a répété dimanche que toute résolution du conflit « durable et significative, doit mener au désarmement du Hamas », qui contrôle la bande de Gaza. Une déclaration qui survient au lendemain de l’appel comminatoire à une trêve de Barack Obama qui avait jeté de l’huile sur le feu dans les relations déjà tendues entre les deux alliés.
De son côté, le Hamas exige un retrait israélien de Gaza et une levée du blocus de l’enclave dont il a pris le contrôle en 2007, deux ans après que l’armée israélienne s’en était unilatéralement retiré.

 

L’ Orient Le Jour/AFP

F. Achouri

Sociologue.

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