Coran européen : une centaine de chercheurs en soutien au projet face à une campagne médiatique « rance »

Une centaine de chercheurs ont signé une tribune de soutien à John Tolan et à son équipe chargée de travailler sur le projet « Le Coran européen ». L’historien franco-américain et plusieurs de ses pairs, Jan Loop, Mercedes García-Arenal et Roberto Tottoli, font face ces dernières semaines à une virulente campagne émanant des rangs de la droite et de l’extrême droite française après que l’information selon laquelle leur projet a obtenu de l’Union européenne, via le Conseil européen de la recherche (ERC), près de 10 millions d’euros a été révélée par la presse. 

Le projet « Le Coran européen », étalé sur six ans (2019 – 2025), vise à mettre en lumière « comment le Coran a influencé la culture et la religion en Europe du Moyen-Age jusqu’au début de l’époque moderne ». « Nous sommes fiers de travailler avec John Tolan et “Le Coran européen” », font part les signataires de la tribunerelayée samedi 17 mai par l’association de chercheurs Fabula. 

« D’abord orchestrée par les médias du groupe Bolloré, puis relayée par des députés RN et LR au Parlement européen, cette campagne rance est désormais feuilletonnée par Le Figaro, qui interviewe à cet effet de médiatiques arbitres des élégances en matière d’islamisme », dénoncent-ils en citant nommément Florence Bergeaud-Blackler et Razika Adnani. La première accuse notamment les chercheurs impliqués dans le projet de faire de « l’islamisation de la connaissance » qui signerait une autre forme de « l’entrisme islamiste », la seconde de faire « le jeu de l’islamisme »

« Aux zélateurs intéressés du bon usage de la dépense publique, qui sont aussi des contempteurs de l’entrisme frériste à Bruxelles, on concédera que les fonds de l’ERC, c’est-à-dire de l’organisme qui a subventionné « Le Coran européen », lui viennent de la Commission européenne. Mais la Commission européenne s’en remet aux expertises entièrement indépendantes de chercheurs venus du monde entier, à qui personne ne dicte ce qu’ils doivent penser. Dix à quinze avis anonymes et circonstanciés sont demandés par dossier examiné. Seules les propositions les plus abouties, les plus incontestables scientifiquement, ont une chance d’être retenues », lit-on. Alors, si le projet a été retenu, « c’est que « le Coran européen » est à la pointe de la recherche. Le contester, c’est mettre le doigt dans un engrenage que les démocraties illibérales, si l’on peut dire, connaissent bien : c’est contester le principe de l’évaluation par les pairs ».

« Oui, nous croyons que le Coran a influencé la culture et la religion en Europe, depuis le début du XIIe siècle au moins. Nous croyons même qu’il faudrait être inculte pour prétendre le contraire. Il faudrait ignorer le geste fondateur de Pierre le Vénérable, abbé de Cluny, qui commanda la première traduction latine du texte coranique, en 1142. Il y a neuf siècles. Depuis le cœur de la Bourgogne. (…) Nous sommes même convaincus que nous sacrifierions à un révisionnisme historique déplorable en laissant dire le contraire, pour ne pas faire de vagues », lancent les chercheurs, qui disent reprendre « à (leur) compte » ce que l’équipe chargé du « Coran européen » écrit du sujet. 

« Nous, signataires de cette tribune, tenons pour un honneur d’avoir été associés aux travaux de nos quatre collègues, d’avoir participé aux colloques qu’ils ont organisés, aux ouvrages qu’ils ont publiés, aux expositions qu’ils ont montées, dans toute l’Europe et à Tunis. Nous les en remercions. »

Saphirnews

F. Achouri

Sociologue et consultante en développement des ressources humaines.

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