François Hollande reçoit le Crif à l’occasion des 70 ans de l’institution

À l’occasion de son 70e anniversaire, le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), qui fédère plus de 60 associations, doit être reçu lundi soir 16 décembre à l’Élysée par François Hollande.

Roger Cukierman, 77 ans, qui le dimanche 26 mai dernier a succédé pour un mandat de trois ans à Richard Prasquier à la tête du Crif, poste qu’il avait déjà occupé de 2001 et 2007 conduira la délégation à l’Élysée. Ce sera pour lui l’occasion de redire au président de la République l’inquiétude de la communauté juive face à l’antisémitisme.

« La situation s’est sensiblement aggravée depuis le début des années 2000, expliquait-il la semaine dernière. Pas tant quantitativement que dans la perception qu’ont les juifs de la situation. » En cause, selon lui : la montée de l’extrême droite, « malgré le langage parfaitement châtié de Marine Le Pen », les appels au boycott des produits israéliens par l’extrême gauche « qui fait de l’antisionisme le nouvel habit de l’antisémitisme », « l’inquiétant succès » de Dieudonné, humoriste condamné à plusieurs reprises pour des propos antisémites, dont les vidéos sont vues « un million de fois ».

Émigration juive vers Israël

À quoi s’ajoute « le phénomène permanent des actes de violence à l’encontre des juifs commis par des jeunes gens issus de l’immigration », qui ne vient « pas forcément des imams et des prêches », mais « d’un climat qui fait des juifs des boucs émissaires ». Mais aussi le risque que font courir les « centaines de salafistes de nationalité française, partis pour la Syrie ou en sommeil en France, et susceptibles de se transformer en de nouveaux Mohammed Merah ».

Roger Cukierman s’inquiète aussi de la « pénétration silencieuse » du Qatar « qui envahit la France et qui est susceptible d’y faire passer les thèses des Frères musulmans » et du vote des parlementaires européens qui demandant l’interdiction de la circoncision ou remettant en cause de l’abattage rituel.

Il récuse néanmoins l’idée que l’augmentation du nombre de départs des juifs français vers Israël (+ 54 % en un an selon le ministère israélien de l’intégration), soit uniquement liée à cette inquiétude, car selon lui, « la situation économique explique aussi que de nombreux Français partent à l’étranger ». Il minimise d’ailleurs ces chiffres (2500 à 3000 en 2013) qui, dit-il « ne prennent pas en compte de les retours » et ne représentent « qu’un tout petit peu plus que 0,5 % de la population juive française, si on estime que celle-ci compte 500 0000 juifs ». 

Une institution née dans la clandestinité

Le Crif est né en 1944, dans la clandestinité. Les grandes organisations juives qui avaient mis en place un réseau d’assistance aux juifs menacés et persécutés avaient créé fin 2003 à Lyon un Comité de défense pour coordonner la résistance. Devenu le Conseil représentatif des israélites de France (Crif) son objectif était alors d’être la voix politique des juifs de France, et de s’assurer qu’une fois la guerre finie, ils retrouvent tous leurs droits de citoyens dans la société française.

Longtemps, le Crif – devenu Conseil représentatif des institutions juives de France tout en gardant son acronyme précédent – est resté discret. Son entrée sur la scène publique est liée à la personnalité de Théo Klein qui en a pris la tête en 1983 et qui a lancé en 1985 le dîner annuel du Crif, devenu une institution incontournable où se retrouvent personnalités politiques, diplomates, et depuis 2008 le président de la République.

Au premier rang de la lutte contre le Front national, le Crif a fait de la lutte contre l’antisémitisme sa priorité depuis les années 2000, marquées par la multiplication des actes antisémites en France liés à la seconde intifada (2000-2005). Roger Cukierman, qui n’hésitait pas alors à interpeller sans ménagement les politiques pour qu’ils prennent les mesures nécessaires face à la montée de l’antisémitisme, n’entend pas changer sa manière de faire, même s’il juge aujourd’hui « Valls et Hollande impeccables sur le sujet » comme le fut précédemment Nicolas Sarkozy.

La Croix

 

F. Achouri

Sociologue.

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