Israël veut simplifier le divorce religieux, même pour les étrangers résidant sur son sol

EXPLICATION Un projet de loi adopté en première lecture au Parlement israélien lundi 5 mars, prévoit des sanctions pour les hommes juifs non israéliens qui refusent d’accorder le divorce à leurs épouses.

Le guet reste cet acte indispensable pour qu’une femme obtienne le divorce et donc la possibilité de se remarier.

1/Quels sont les faits ?

La Knesset, le parlement israélien, a adopté lundi 5 mars en première lecture un projet de loi qui permettrait aux tribunaux rabbiniques israéliens de sanctionner les hommes juifs non israéliens qui refuseraient d’accorder le divorce à leurs épouses… à condition qu’ils vivent en Israël.

Concrètement, et s’il était définitivement adopté, il autoriserait les tribunaux israéliens à sanctionner les hommes juifs étrangers vivant dans le pays.

Le projet de loi vise à régler le problème des femmes juives agunot(littéralement « enchaînées ») qui se voient refuser le divorce religieux par leur mari. La loi juive traditionnelle permet aux hommes d’épouser une seconde femme dans certaines circonstances, mais pas aux femmes.

« Nous avons un vrai problème avec l’ex-Union soviétique », a expliqué au Times of Israël la députée Aliza Lavie du parti centriste et laïc Yesh Atid, qui milite en faveur d’une version du projet de loi depuis 2013 en octobre. De riches ressortissants refuseraient le divorce à leurs épouses juives « pour des raisons financières ». Aujourd’hui, les tribunaux locaux ne peuvent pas venir en aide aux femmes qui ne sont ni citoyennes, ni résidentes du pays.

Grâce à ces nouvelles mesures, les cours rabbiniques israéliennes pourront faire pression sur les maris d’où qu’ils viennent, s’ils mettent les pieds sur le sol israélien. Parmi les sanctions qui devraient être appliquées : des amendes, des avoirs gelés et même des peines d’emprisonnement de courte durée.

2/ Quel est le contexte ?

Aujourd’hui, la rupture du mariage religieux juif est compliquée et largement défavorable aux femmes. En effet, selon le droit rabbinique, pour être libérée de son mariage, l’épouse doit obtenir de la part de son mari un document indispensable, le guet, sans quoi, le divorce civil seul ne pourrait être admis. Cet acte de divorce est encadré par le Beth-Din (commission rabbinique).

La loi juive traditionnelle accorde aux hommes la possibilité de se remarier mais aussi de refuser de consentir à la séparation. Auquel cas, la femme ne peut envisager de secondes noces.

Sans la reconnaissance du divorce religieux, le remariage est qualifié d’adultère. De même, si la femme venait à avoir des enfants, ces derniers seraient désignés comme étant des mamzer (bâtards), une qualification encore infamante et qui rend quasi-impossible leur mariage avec un juif ou une juive à l’âge adulte.

3/ Quelles sont les réactions ?

Membre du courant massorti (situé entre le judaïsme orthodoxe et le judaïsme libéral) et rabbin à Paris, Yeshaya Dalsace exprime son scepticisme quant à ce projet de loi. Le texte, rappelle-t-il d’abord, n’a pas dépassé la première lecture et peut encore, d’ici à la troisième et dernière lecture, être modifié ou retiré.

Au-delà, il redoute qu’il n’ait « aucune efficacité réelle ». « Je ne pense pas que cette loi soit effective parce que l’État d’Israël n’a pas de pouvoir sur des citoyens étrangers, compte tenu des accords internationaux », note-t-il.

 

La Croix

F. Achouri

Sociologue.

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