Le pape François invite les catéchistes à « savoir changer »

« Tu connais Jésus-Christ ? – Jésus qui ? » Jacqueline Izard se souvient de ce bref échange avec une enfant débarquant au catéchisme qu’elle assure dans une école de Paris. De séances si chahutées avec son groupe de CM2 qu’elle se demande ce qu’ils peuvent en retirer…

Venue à Rome aux Journées internationales des catéchistes, tenues depuis jeudi 26 septembre dans le cadre de l’Année de la foi, cette catéchiste française s’est reconnue dans l’intervention du pape François, qui a clos hier ces journées – voulues par son prédécesseur – par une messe célébrée place Saint-Pierre. 100 000 personnes y assistaient, dont plus de 1 000 Français.

Dans son homélie, le pape a défini le catéchiste comme « celui qui garde et alimente la mémoire de Dieu, la garde en lui-même et sait l’éveiller chez les autres ». Une « mémoire de Dieu, qui réchauffe le cœur », a-t-il insisté, et sans laquelle « tout s’aplatit sur le moi, sur mon bien-être » au risque de perdre son identité même, tel le riche sans nom dans l’Évangile de Luc proclamé durant la messe.

 

Le pape, tel un « vieux jésuite »

Mais, défi de la nouvelle évangélisation, la catéchèse exige un renouvellement de ses méthodes. S’adressant vendredi 27 septembre aux 1 600 responsables nationaux et diocésains de la catéchèse venus de 51 pays, le pape François n’a pas manqué de tenir des « paroles de provocation », comme l’en a remercié hier Mgr Rino Fisichella, président du Conseil pontifical pour la promotion de la nouvelle évangélisation, organisateur de ces journées. Car la catéchèse offre un des terrains où le nouveau pape veut bousculer l’Église dans sa « manière d’être ».

Assis vendredi dans la grande salle Paul VI du Vatican derrière une table, tel un « vieux jésuite » – selon ses propres mots –, il a livré aux congressistes ses attentes, sans détour. Comparant la situation à celle de Jonas qui, dans la Bible, se montre peu enclin de prêcher à Ninive, grande ville païenne, il a brossé, non sans humour, le portrait du catéchiste campé sur ses « schémas » et « idées claires », qui « finit par être une statue de musée ».

 

La difficulté et la beauté de la transmission de la foi

Reprenant le vocabulaire marquant son pontificat depuis le début, il a pressé ses auditeurs à gagner les « périphéries », sans rester « fermés dans leur groupe, leur mouvement, leur paroisse », sans être « rigides » – « Dieu n’est pas rigide » – mais en sachant « s’adapter aux circonstances » pour annoncer l’Évangile, en se montrant « créatifs ». « Pour être fidèles, pour être créatifs, il faut savoir changer », a-t-il souligné, plaçant cette créativité sous la conduite du Christ. Il avait demandé le même effort créatif à son clergé romain le 16 septembre au Latran

Des accidents ne sont pas exclus lorsqu’on ose s’aventurer hors des sentiers battus. Mais le pape a déclaré avec force : « Je préfère mille fois une Église accidentée qu’une Église malade ! », reprenant une formule employée dans son livre d’entretien paru en 2010 lorsqu’il était archevêque de Buenos Aires.

Affecté par le fait que dans son propre ancien diocèse « tant d’enfants ne savent pas faire le signe de croix », le pape argentin a reconnu la difficulté et en même temps la beauté de transmettre la foi aujourd’hui. Une mission qui ne se réduit pas au temps d’une leçon mais qui doit habiter tout l’être du catéchiste se laissant regarder par le Christ. « Prêchez toujours l’Évangile, et également avec les mots ! », leur a conseillé en souriant le pape, citant saint François d’Assise.

 

Les catéchistes réconfortés par le pape

Jeudi 26 septembre, dans son homélie matinale, il a rappelé que la connaissance de Jésus à travers le seul catéchisme « n’est pas suffisante ». Ce que le motu proprio  Porta fidei , de Benoît XVI, promulguant en 2011 l’Année de la foi, reconnaît : « La connaissance des contenus à croire n’est pas suffisante si ensuite le cœur (…) n’est pas ouvert par la grâce qui permet d’avoir des yeux pour regarder en profondeur et comprendre que ce qui a été annoncé est la Parole de Dieu. » Le théologien français Joël Molinario a de son côté resitué la place du Catéchisme de l’Église catholique, dans son intervention précédant l’arrivée du pape François.

Par leurs applaudissements nourris, les catéchistes ont immédiatement manifesté qu’ils avaient bien reçu le message. Plusieurs congressistes français – venus en nombre, 320, dont 10 évêques – disaient repartir « confortés face aux défenseurs d’un retour au catéchisme que l’on récitait par cœur ». Surtout, ils se retrouvent déjà dans l’appel du pape à rejoindre les « périphéries » (« Les enfants du caté ramènent d’autres copains, éloignés de l’Église, qui demandent ensuite le baptême, entraînant ainsi leurs propres parents qui étaient eux-mêmes éloignés », témoigne ainsi le P. Nicolas Rosset, curé de Suresnes) et à faire preuve de créativité.

Jacqueline Izard, elle, doit en faire preuve à chaque séance pour captiver son jeune public, qu’elle aime tel qu’il est : « Je fais souvent tout à fait autre chose que ce que j’avais préparé. »

 

Source : La Croix

F. Achouri

Sociologue.

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