Le ministère des armées a rendu public mercredi 14 mars un livret pour « expliquer la laïcité française » et répondre à la perception d’une « France hostile aux religions ».
Sur la page de couverture, des coiffes d’aumôniers mêlées à des coiffes d’officiers et sous-officiers. Le livret que le ministère des armées a présenté mercredi 14 mars, intitulé Expliquer la laïcité française : une pédagogie par l’exemple de la « laïcité militaire », répond à une « démarche pragmatique ».
Le point de départ, « c’est une demande émanant de nos missions étrangères et attachés de défense pour expliquer la laïcité française à nos partenaires étrangers », a indiqué Philippe Errera, directeur général des relations internationales et de la stratégie (DGRIS) du ministère, en préambule à une matinée d’échanges sur le sujet aux Invalides.
Un livre ludique et illustré pour parler de laïcité
Chargé de mission laïcité et fait religieux à la DGRIS et maître d’œuvre du livret, Éric Germain a expliqué que l’objectif était de décrire « ce qu’est la laïcité et surtout ce qu’elle n’est pas », en s’appuyant sur l’exemple de la pratique de l’institution de défense.
Cette « laïcité militaire » – selon une expression employée par l’ancien chef d’état-major des armées Jean-Louis Georgelin en 2009 – est « une pratique de la laïcité où le religieux existe à ciel ouvert », a insisté Éric Germain. De fait, l’État salarie des aumôniers militaires de quatre cultes, catholique, israélite, protestant depuis 1874 et musulman depuis 2005.
« Les armées ont depuis très longtemps intégré la spiritualité », a rappelé l’aumônier en chef musulman Abdelkader Arbi, faisant référence à la « loi fondatrice » de 1880 sur les aumôneries.
Dissiper des « malentendus »
Dans le détail, le document apporte des réponses concrètes aux questions les plus fréquentes afin de dissiper des « malentendus » et « sentiments négatifs envers notre pays ». Par exemple : « La laïcité française est-elle hostile aux religions ? Non » ; Est-elle « l’expression d’une indifférence absolue de l’État vis-à-vis du religieux ? Non » ; « Interdit-elle d’exprimer son identité religieuse dans l’espace public ? Non » ; « La laïcité est-elle une exception française ? Non » ; ou encore « Les Français sont-ils majoritairement athées ? Non ».
Le livret définit la laïcité française comme « un principe juridique mais aussi une culture politique ». Il décrit la différenciation entre les espaces public et privé, les règles d’application dans les institutions publiques ouvertes et celles dites « fermées », ainsi que l’action commune des aumôneries militaires. « Le monde des armées peut servir de matrice pour l’ensemble de la société », a estimé l’aumônier en chef israélite, le rabbin Joël Jonas.
Dans le respect du principe de neutralité de l’espace public d’État et dans le cadre « fermé » de l’institution, « la laïcité militaire est une laïcité ouverte », a conclu le professeur Philippe Portier, directeur du groupe Sociétés, religions et laïcités à l’École pratique des hautes études. Soulignant que « les armées ont fait beaucoup d’efforts depuis les années 1990 sur les identités individuelles et les religions », le sociologue a relevé que « le livret explore la politique religieuse du ministère » et que « le religieux est un objectif de politique publique ».
La Croix