Les musulmans pour la liberté religieuse, inquiets de l’extrémisme

La moitié des musulmans dans le monde sont préoccupés par l’extrémisme religieux dans leur pays, dont une large majorité en Egypte, en Tunisie, en Irak et en Indonésie. Les attentats suicides ou les autres formes de violences contre les civils au nom de l’islam sont largement rejetés mais est approuvée par des minorités substantielles au Bangladesh, en Egypte, en Afghanistan et dans les Territoires occupés palestiniens.

Ce sont quelques unes des conclusions d’une vaste enquête de l’institut américain de recherche Pew publiée mardi 30 avril. Elle a été réalisée de 2008 à 2012 auprès de 38 000 personnes dans 39 pays d’Afrique, du Moyen-Orient, d’Asie et d’Europe, portant sur le thème de « Religion, politique et société » dans la communauté musulmane.

Celle-ci, évaluée à 1,6 milliard d’individus, est la religion la plus importante au monde après le christianisme

Une majorité pour la charia et le pluralisme religieux

La plupart des musulmans interrogés souhaitent que la charia fasse force de loi dans leur pays, sauf pour les sondés originaires d’Asie centrale et des Balkans. Rappelons que la charia est un ensemble de normes juridiques et sociales qui tirent ses sources du Coran, de la tradition prophétique (Sunna) et du consensus des savants. La mauvaise compréhension de ce terme, perçu négativement en Occident parce que résumé aux châtiments corporels, entretient les préjugés à l’égard des musulmans.

A ce propos, la flagellation, les mains coupées pour les voleurs ou encore l’exécution de musulmans convertis à une autre religion recueillent une minorité d’avis favorables, sauf en Afghanistan et au Pakistan. Les « crimes d’honneur » contre les femmes sont rejetés par l’ensemble des musulmans à l’exception d’une majorité en Afghanistan (76 %) et en Iraq (67 %).

L’étude montre que l’application de la charia est surtout souhaitée dans la sphère privée pour régler les affaires familiales ou foncières. « Les musulmans à travers le monde ont diverses compréhensions de ce que la charia signifie dans la pratique », souligne Pew, notant au passage qu’ils sont nombreux (55 % en moyenne dans les 21 pays où la question a été posée) à estimer qu’elle ne doit être appliquée qu’aux seuls musulmans.

Par ailleurs, ils sont aussi une majorité à être favorables à la liberté religieuse aux autres cultes, l’islam n’empêchant lui-même pas le pluralisme religieux.

Une aspiration à la démocratie

La plupart des sondés ne perçoivent aucun conflit entre la pratique religieuse et la vie moderne, ni entre la science et la religion. La grande majorité est également favorable à un régime démocratique plutôt qu’à une autocratie. La corruption et le chômage sont des problèmes largement dénoncés.

Beaucoup d’entre eux aiment la musique et les films occidentaux bien qu’ils pensent que cette culture « sape la moralité ». Une très forte majorité considère que la prostitution, l’homosexualité, le suicide ou encore l’alcool sont immoraux.

L’étude du Pew, qui tend à briser des préjugés bien qu’il faut relativiser sa portée, met à nouveau en exergue la diversité des opinions dans le monde musulman, qui a aussi été l’objet d’un précédent rapport du centre de recherche en août 2012. La communauté musulmane, à l’instar des autres communautés religieuses, n’est pas un groupe monolithique, loin s’en faut.

Saphirnews

 

 

 

 

 

 

F. Achouri

Sociologue.

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