La lutte contre le blanchiment monte en puissance au Vatican

La nouvelle autorité, qui a présenté le 19 mai son rapport annuel, a reçu plus de 200 déclarations de soupçons sur des transactions financières et ordonné une inspection de la « banque du Vatican »

 

Cela se veut désormais une tradition mais reste une nouveauté. Pour la deuxième année consécutive, le Suisse René Brülhart (photo), directeur de l’Autorité d’information financière du Saint-Siège (AIF), a présenté à la presse le rapport annuel 2013 de son institution créée par Benoît XVI fin 2010 pour lutter contre le blanchiment d’argent, à l’instar de Tracfin en France. René Brulhart, directeur de l'Autorité d'information financière (AIF), au Vatican, le 22 mai 2013.

Signe de la montée en puissance de son activité, l’AIF a enregistré l’année dernière 202 déclarations de soupçons sur des transactions financières au Vatican contre six en 2012 et une seule en 2011. 

Cinq poursuites judiciaires

« Cette augmentation ne veut pas dire qu’il y aurait plus de blanchiment mais que le « reporting » fonctionne bien », a commenté René Brülhart, rappelant qu’une « déclaration de soupçon n’est pas une preuve de blanchiment » et prévoyant une baisse des déclarations l’an prochain.

En pratique, seules cinq déclarations sur les 202 ont donné lieu à des poursuites judiciaires du Saint-Siège. « À ce stade », a précisé toutefois le président de l’AIF, indiquant qu’il faut parfois plusieurs années de suivi de transactions et de coopération internationale pour recueillir suffisamment d’éléments justifiant des poursuites.

Sans fournir d’explications sur ces cinq affaires en cours, René Brülhart a vanté l’essor de coopération que son autorité a développé avec ses entités homologues à travers une série d’accords bilatéraux d’échanges d’informations conclus avec l’Italie, la Belgique, Chypre, Monaco ou encore les États-Unis.

L’AIF a rejoint depuis juillet dernier ses homologues regroupés dans ce qui s’appelle le « groupe Egmont ».

Comme le précise une source vaticane à La Croix, la quasi-totalité des 202 déclarations de soupçons émanent de transactions opérées avec l’Institut pour les œuvres de religion (IOR), « banque du Vatican » qui fait elle-même l’objet d’une mise aux normes internationales de ses procédures sous la conduite de son président, Ernst Von Freyberg.

Inspection par Ernst & Young de la « banque du Vatican »

Pour faire valoir son indépendance, l’AIF a commandé une inspection de l’IOR. Cette inspection, une première, a été effectuée par le cabinet d’audit Ernst & Young et a duré six semaines à partir de janvier dernier. Le rapport final de cette inspection n’a pas encore été remis à l’AIF et fait l’objet d’échanges de questions-réponses en cours entre l’auditeur et l’IOR.

L’AIF elle-même a fait récemment l’objet d’un changement à sa tête. En janvier dernier, le pape François a remplacé son président, le cardinal Attilio Nicora, remplacé par Mgr Giorgio Corbellini.

« Il y a un changement du cadre légal, du cadre institutionnel, du cadre des ressources humaines », a résumé René Brülhart, concluant qu’il faut « encore un changement aussi de la mentalité » avant d’estimer optimal le travail de l’AIF : « Ce n’est pas encore parfait mais nous sommes sur le bon chemin ».

L’avocat suisse a refusé de répondre à des questions précises de la presse portant sur son niveau de salaire.

 

La Croix

F. Achouri

Sociologue.

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