Cette attaque intervient alors que les Etats-Unis et l’Europe ont appelé, vendredi, à une reprise des négociations dans le pays et ont accusé les talibans de faire régner la violence.
Les attentats à la bombe perpétrés, samedi, devant une école pour filles de Kaboul ont fait au moins cinquante morts et une centaine de blessés, dont beaucoup d’étudiantes, a annoncé le ministère de l’intérieur afghan, dimanche 9 mai. Cette attaque intervient au moment où le ramadan touche à sa fin et alors que les forces étrangères accélèrent leur retrait, laissant derrière elles un pays déchiré par vingt années de guerre.
Le porte-parole du ministère, Tariq Arian, a précisé à la presse qu’une voiture piégée avait explosé, samedi, devant l’école Sayed Al-Shuhada, et que deux autres bombes ont explosé au moment où les élèves, paniqués, se précipitaient dehors.
Les explosions se sont produites dans le quartier de Dasht-e-Barchi, dans l’ouest de la capitale afghane, au moment où les habitants faisaient leurs courses de l’Aïd-el-Fitr, une fête du calendrier islamique qui, la semaine prochaine, marquera la fin du mois de jeûne du ramadan. Ce quartier est peuplé majoritairement par des chiites hazara, souvent pris pour cibles par des militants islamistes sunnites.
« J’ai vu des corps ensanglantés dans une nuée de fumée et de poussière, alors que certains des blessés criaient et souffraient, a déclaré à l’Agence France-Presse Reza, qui a échappé aux explosions. J’ai vu une femme chercher entre les corps en appelant sa fille. A ce moment-là, elle a trouvé un sac de sa fille ensanglanté et elle s’est effondrée. » Reza a ajouté que la plupart des victimes étaient des adolescentes qui venaient de quitter leur école.
Les talibans nient leur implication
La mission de l’Union européenne (UE) en Afghanistan a fustigé cet « attentat ». « S’en prendre à des élèves de primaire dans une école pour filles fait de cet attentat une attaque contre l’avenir de l’Afghanistan. Contre des jeunes gens déterminés à améliorer le sort de leur pays », a déclaré la mission de l’UE sur Twitter. La mission d’assistance des Etats-Unis en Afghanistan a exprimé son « profond dégoût » après l’explosion.
Une enquête pour « attaque terroriste » a été ouverte, a déclaré le porte-parole adjoint du ministère de l’intérieur, Hamid Roshan. « Les gens sur place sont furieux ; ils s’en sont pris aux ambulanciers », a déploré de son côté le porte-parole du ministère de la santé, Ghulam Dastagir Nazari.
L’attentat n’a pas été revendiqué, à ce stade, et les talibans ont nié toute implication. Mais le président afghan, Ashraf Ghani, les a accusés d’en être responsables. « Les talibans sont derrière ces attentats. Ils ont déjà mené des attaques similaires contre des établissements scolaires par le passé », a déclaré M. Arian.
Retrait américain
En mai 2020, un groupe d’hommes armés avait attaqué en plein jour une maternité soutenue par Médecins sans frontières (MSF), tuant vingt-cinq personnes, dont seize mères et plusieurs nouveau-nés. MSF avait décidé par la suite de quitter ce projet. Cet attentat n’a jamais été revendiqué, mais le président afghan avait accusé les talibans et le groupe Etat islamique.
« Ce groupe de sauvages n’a pas la capacité d’affronter les forces de sécurité sur le champ de bataille, alors il s’attaque à la place de façon barbare à des bâtiments publics et aux écoles de filles. »
L’ambassadeur américain par intérim dans la capitale afghane, Ross Wilson, a qualifié l’attentat d’« abominable » et d’« attaque impardonnable contre les enfants et l’avenir de l’Afghanistan ». Le ministre des affaires étrangères du Pakistan, un pays accusé de soutenir les talibans, a, quant à lui, dénoncé une attaque « condamnable ».
Le 24 octobre, un homme s’était fait sauter dans un centre de cours particuliers dans le même quartier, tuant dix-huit personnes, parmi lesquelles des étudiants. Cet attentat n’a, lui non plus, pas été revendiqué.
Cette explosion intervient alors que les Etats-Unis et l’Europe ont appelé, vendredi, à une reprise « immédiate » et « sans condition préalable » des négociations en Afghanistan, accusant les talibans de faire régner la violence durant le retrait des forces étrangères et de bloquer le processus de paix.
Les talibans, chassés du pouvoir fin 2001 par une intervention américaine, ont récemment intensifié leurs attaques à travers le pays, selon les autorités afghanes. Vingt ans après leur déploiement à la suite des attentats du 11 septembre 2001, survenus sur leur sol, les Etats-Unis ont entrepris de retirer leurs forces d’Afghanistan.
Le Monde / AFP / Reuters