Le maillot intégral, souvent appelé burkini, est l’objet chaque été d’une interdiction prise par arrêté municipal dans plusieurs plages françaises. Cette année, la justice administrative a retoqué deux arrêtés contestés par la Ligue des droits de l’Homme (LDH).
A chaque saison estivale, la question du burkini refait un tour de piste dans l’actualité française, mais cette fois, c’est parce que la justice s’en est mêlée et qu’elle a donné raison par deux fois aux défenseurs des libertés fondamentales. Le tribunal administratif de Nice a suspendu un arrêté pris le 15 juillet dernier par la municipalité de Mandelieu-la-Napoule (Alpes-Maritimes) interdisant pendant l’été la baignade à toute personne portant « une tenue de bain manifestant de façon ostensible une appartenance religieuse ».
L’arrêté anti-burkini avait été contesté par la Ligue des droits de l’Homme (LDH) qui a donc obtenu gain de cause. Une telle interdiction « porte une atteinte grave et illégale à trois libertés fondamentales : la liberté d’aller et venir, la liberté de conscience et la liberté personnelle », a fait valoir, vendredi 18 juillet, le tribunal administratif de Nice.
« Au sein de l’espace public, chacun jouit des libertés garanties par la loi. Les maires, dans le cadre de leur mission de maintien de l’ordre, ne peuvent y porter atteinte que pour prendre des mesures adaptées, nécessaires et proportionnées. Ces mesures doivent tenir compte des circonstances de temps et de lieu et être justifiées par des impératifs d’ordre public. Il en va notamment ainsi en ce qui concerne les mesures que le maire d’une commune du littoral peut prendre pour organiser l’accès à la plage », rappelle d’abord le juge des référés.
Si la mairie justifie son arrêté par « un risque de trouble à l’ordre public durant l’été 2025 », le magistrat estime que les arguments présentés pour étayer ce risque sont insuffisants. « La commune se borne à faire état de troubles et de heurts qui auraient eu lieu sur les plages de la commune au cours de l’été 2024, ainsi que du contexte actuel de tensions interreligieuses », souligne le juge. Par ailleurs, « ni ces incidents, au demeurant non établis, ni le contexte de tensions interreligieuses ne sont susceptibles de faire apparaître que l’interdiction sur l’ensemble des plages de la commune de tenues manifestant de manière ostensible une appartenance religieuse serait, à la date à laquelle a été pris l’arrêté contesté, justifiée par des risques avérés de troubles à l’ordre public », tranche le tribunal par ordonnance.
Une victoire qui en suit une autre à Carry-le-Rouet
La suspension de l’arrêté a été fustigée par le maire de Mandelieu-la-Napoule, Sébastien Leroy, qui a dénoncé « l’inaction face au communautarisme et à l’entrisme islamique ». « De par sa signification religieuse mais surtout politique basée sur le précepte que la femme est inférieure à l’homme, (le burkini) fut la cause de troubles publics importants sur les plages auxquels la mairie a mis un terme selon la volonté réitérée et affirmée des citoyens qui ne veulent plus y être confrontés », a-t-il réitéré, appelant les pouvoirs publics à interdire « le burkini comme toute tenue religieuse promouvant l’intégrisme islamique ».
La LDH s’est, pour sa part, félicitée de la décision. « Ces interdictions constituent un dévoiement de la laïcité, renforcent le sentiment d’exclusion et contribuent à légitimer ceux qui font de l’islamophobie leur fonds de commerce », a fait savoir l’organisation.
Une interdiction similaire imposée en 2023 dans la même commune avait déjà été annulée par le Conseil d’Etat grâce au recours déposé par la LDH. Celle-ci est aussi à l’origine de la suspension d’un autre arrêté anti-burkini, émis cette fois à Carry-le-Rouet (Bouches-du-Rhône). Le tribunal administratif de Marseille a également estimé, dans une ordonnance du 11 juillet dernier, que l’interdiction municipale porte une « atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales » et qu’« aucun risque pour l’hygiène ou la sécurité des usagers de la plage, des sauveteurs et des baigneurs, lié au port des tenues interdites » n’avait pu être démontré.
Saphirnews