Vendredi 8 avril, des milliers de Français de confession juive ont reçu un SMS de l’équipe de campagne d’Éric Zemmour les renvoyant sur une page web du candidat à l’élection présidentielle intitulée « Message d’Éric Zemmour aux Français de confession juive ». Selon les informations de BFMTV, lundi 11 avril, la page est restée en ligne jusqu’au 10 avril, date du premier tour, puis a été supprimée. Dans la soirée de mardi, une enquête préliminaire a été ouverte à Paris après la plainte de deux associations sur ce fameux démarchage par SMS. Sollicité par l’AFP, le parquet de Paris a confirmé l’ouverture de cette enquête pour des infractions relatives à des données à caractère personnel.
« Sur plainte de l’UEJF et de l’association J’accuse AIJI, une enquête a été ouverte ce jour des chefs de détention, conservation, enregistrement, transmission de données à caractère personnel en dehors des cas prévus par la loi, communication à un tiers sans autorisation et détournement des finalités d’un fichier de données à caractère personnel », a précisé le parquet. Les investigations ont été confiées à la Brigade de répression de la délinquance à la personne (BRDP), a aussi indiqué cette source.
Interdiction du traitement de données personnelles à connotation religieuse
Pour rappel, la loi française interdit le traitement de données personnelles à connotation religieuse. De nombreux électeurs qui ont reçu le message ont fait des signalements à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). Les deux associations, l’Union des étudiants juifs de France (UEJF) et J’accuse, reprochent à Éric Zemmour et son équipe d’avoir illégalement utilisé une base de données « qui, directement ou indirectement », fait « apparaître les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses » des personnes visées par la campagne de SMS, sans leur consentement. Pour les deux associations, ce démarchage politique est « la plus massive exploitation de listes nominatives de juifs depuis la rafle du Vel’d’hiv ».
Une instruction ouverte par la CNIL
Si l’équipe du candidat a bien confirmé à la chaîne d’information continue avoir envoyé « une dizaine de milliers de SMS », elle assure toutefois qu’elle ne visait pas clairement des Français de confession juive. Elle aurait fait appel à un courtier en données pour l’envoi des SMS, à qui elle a demandé de cibler les personnes qui ont communiqué leur numéro de téléphone à des organismes ou services traitant de la question de l’antisémitisme. Elle assure néanmoins ne pas connaître l’identité de ceux-ci mais qu’ils ont donné leur accord pour que les données soient partagées à des fins de communication politique, selon Libération. Certains électeurs ayant reçu le SMS d’Éric Zemmour ont affirmé à BFMTV qu’ils ne se rappellent pas avoir laissé leur numéro à un quelconque organisme de ce type.
La CNIL a ouvert une instruction le 9 avril. Si une infraction est constatée dans cette affaire, Éric Zemmour risquerait jusqu’à 20 millions d’euros d’amende administrative et une mise en demeure. Au pénal, précise la chaîne d’info continue, il encourt jusqu’à 5 ans de prison et 300.000 euros d’amende. En outre, le code pénal punit de cinq ans d’emprisonnement et de 300.000 euros d’amende la création d’un fichier faisant apparaître des croyances religieuses ou des origines raciales ou ethniques sans le consentement de l’intéressé. La semaine d’avant déjà, son équipe de campagne avait été épinglée pour avoir laissé des messages vocaux sur le répondeur téléphonique de milliers de Français. Cette pratique est autorisée par la CNIL, mais très réglementée.
Capital