La mode musulmane, un marché à 230 milliards de dollars

   Le marché de la mode musulmane, en plein croissance, pèse déjà 230 milliards de dollars. Oui, on peut porter le hijab avec élégance.

En janvier dernier, la firme italienne de luxe Dolce et Gabanna a mis en joie les fashionistas musulmanes fortunées en annonçant qu’elle allait désormais vendre des foulards, des hidjabs et des abbayas (longues robes) en plus de ses chemisiers décolletés et jupes fendues. L’occasion pour la chaîne de télévision qatarie Al Jazeera de faire le point sur la mode musulmane – un secteur en plein boom.

Ce marché est porteur: «Les consommatrices musulmanes dépensent environ 230 milliards de dollars pour leurs vêtements, soit plus que les marchés britannique, allemand et indien combinés», selon le Rapport sur l’état de l’économie islamique.

Un pouvoir d’achat en forte hausse
Tout cet argent ne part évidemment pas dans la mode musulmane. Mais plusieurs indicateurs montrent que la tendance est bien enclenchée, écrit Al Jazeera: pour 88% des habitants des pays islamiques, la religion est importante (le chiffre est de 33% en Europe et de 50% aux Etats-Unis); l’âge moyen dans les pays musulmans est de 30 ans en Europe (44 ans aux Etats-Unis et en Europe), ce qui signifie que le pouvoir d’achat va encore s’élever; ces pays sont de plus en plus riches; enfin, le monde devrait être peuplé de 29% de musulmans en 2030.

Pour ces consommatrices, le regard des Occidentaux n’est pas toujours simple à affronter: il faut donc sortir des vêtements mal coupés qui véhiculent une mauvaise image, explique le créateur de la marque Shukr, un Jordano-Britannique qui se présente comme le premier couturier à avoir conçu des vêtements spécialement pour les musulmans d’Europe, en 2002. Aujourd’hui sa marque est distribuée aux Etats-Unis, en Europe, au Moyen-orient et au Maghreb.

Success stories musulmanes
C’est en remarquant dans un restaurant une mère et sa fille qui étaient vêtues rigoureusement de la même manière que la Turque Kerim Ture eut aussi l’idée de se lancer. Créée en 2012, sa plateforme Modanisa distribue trois ans plus tard plus de 200 marques de mode musulmane, qu’elle expédie dans 60 pays. Autre success story, celle de la Suédo-Jordanienne Iman Aldebe, qui cible une clientèle haut de gamme avec par exemple des foulards de soie précieuse noués à l’arrière et qui sont aujourd’hui vendus dans les grands-magasins chics de Paris, Dubaï ou New York.

Cette montée en puissance de la mode musulmane ne passe pas inaperçue. On se souvient l’émoi provoqué par le clip publicitaire «Close the loop» de la chaine suédoise H&M en septembre 2015, qui montrait quelques secondes la mannequin Mariah Idrissi coiféée d’un hidjab.

«Certains estiment que le foulard est et reste un signe d’oppression des femmes, d’autres s’indignent que l’on puisse faire d’un symbole de foi un accessoire de prêt-à-porter. D’autres encore y voient le cynisme d’une enseigne qui flatte sa clientèle» écrivait Le Temps.

La normalisation en tout cas est visible notamment sur Instagram ou Pinterest, où s’expose une mode musulmane colorée et vibrante, comme sur TheHijabStylist, HijabStyle et HidjabStyle1.

Autant de façons d’accompagner les nouveaux modes de vie des musulmanes qui de plus en plus sortent de chez elles, conduisent, travaillent, bref existent dans la sphère publique.

 

Le Temps

Fatima Achouri

Sociologue spécialiste de l’islam contemporain.

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