Le dialogue islamo-chrétien se régionalise

Pour la première fois, quatre forums régionaux islamo-chrétiens se sont tenus samedi 6 juin simultanément à Paris, Rennes, Saint-Étienne et Marseille.

 

Les participants au forum islamo-chrétien, le 6 juin à Paris.      L’ambition était de toucher davantage de croyants que lors des forums nationaux organisés à Lyon depuis 2011.

« La transmission des valeurs et de la foi touche à la question de l’identité. » Devant une cinquantaine de personnes réunies au Défap, le service protestant de mission, à Paris, Mustapha Kordjani, président de l’Institut Andalus de Châtenay-Malabry, aborde le sujet qui rassemble des personnes engagées dans le dialogue entre chrétiens et musulmans : la question de la transmission aux jeunes générations, dans les familles et les communautés.

Le P. Philippe de Kergorlay, curé de Chelles (Seine-et-Marne) et délégué au dialogue interreligieux dans le diocèse de Meaux, lui répond : « Aux parents d’apprendre à leurs enfants à intérioriser les raisons de telle ou telle manière de faire, qu’il ne s’agisse pas seulement de codes sociaux qui s’imposent sans que les jeunes n’en comprennent la raison profonde. »

Trois autres rencontres se tenaient le même jour à Marseille, Saint-Étienne et Rennes

Le P. de Kergorlay, comme la plupart des personnes présentes samedi 6 juin, n’avait jamais participé aux forums nationaux islamo-chrétiens organisés chaque année depuis 2011 à Lyon. Mais il a répondu présent pour ce premier forum « décentralisé », trois autres rencontres se tenant le même jour à Marseille, Saint-Étienne et Rennes. L’idée était de faire débattre des chrétiens et des musulmans plus habitués à se rencontrer dans leur quartier ou leur ville qu’à un niveau plus large.

« Nous n’avons pas invité d’organisation ou d’association, mais des personnes engagées dans le dialogue, d’une manière ou d’une autre, qui sont là à titre personnel et non en représentation d’une institution », explique le P. Jean Courtaudière, délégué au dialogue interreligieux en Seine-Saint-Denis et organisateur de la journée parisienne. Une telle rencontre au niveau régional doit-elle se renouveler ? À Paris, la plupart des personnes présentes ont répondu positivement, évoquant la possibilité de créer d’autres éditions dans le nord ou l’est de la France.

« Ces forums régionaux étaient un défi »

« Ces forums régionaux étaient un défi, reconnaît le P. Vincent Feroldi, cheville ouvrière de ces rencontres et qui prendra en septembre la tête du service des relations avec l’islam (SRI) de la Conférence des évêques de France. Nous avons lancé cette idée en décembre dernier. Depuis, il y a eu les événements de janvier (les attentats contre Charlie Hebdo et le supermarché cacher de Vincennes, NDLR), et on se demandait vraiment si ces rencontres pourraient avoir lieu. Le fait qu’elles se soient tenues montre une attente de part et d’autre. »

« Plus on va sur le terrain, plus les croyants s’aperçoivent que la rencontre avec les musulmans les concerne, renchérit Jean Lafosse-Marin, engagé dans le dialogue interreligieux dans les Hauts-de-Seine. Ce forum va nous aider localement à ‘‘faire prendre la mayonnaise’’. » Désormais, il « faut se rendre visible de ceux qui ne sont pas familiers du dialogue », estime Anne-Sophie Vivier-Muresan, enseignante à l’Institut catholique de Paris. Quant au P. Nicolas de Bremond d’Ars, délégué épiscopal au dialogue interreligieux pour le diocèse de Paris, il juge « appréciable de pouvoir poser de manière courtoise et ferme la différence ». « Au plus près du terrain, le dialogue est parfois plus consensuel, observe-t-il. Il faudrait faire deux types de rencontres, celles qui nous permettent une connaissance mutuelle et celles qui permettent de ne pas faire l’impasse sur les obstacles. »

 

La Croix

F. Achouri

Sociologue.

Nos services s'adressent notamment aux organisations publiques et privées désireuses de mieux comprendre leur environnement.

Articles recommandés