Le Maroc inaugure son nouveau centre de formation des imams

Le nouveau centre accueillera les imams marocains, en formation permanente, mais aussi des étudiants envoyés par des pays voisins. L’objectif est notamment de contrer l’influence du wahhabisme.

Le roi du Maroc, Mohammed VI, a inauguré vendredi 27 mars 2015, à Rabat, l’« Institut Mohammed VI...

Le roi du Maroc, Mohammed VI, a inauguré vendredi 27 mars, à Rabat, l’« Institut Mohammed VI de formation des imams prédicateurs et des prédicatrices ». Cette institution, dont la construction a été lancée il y a un an, sera « l’un des instruments au service de l’approche développée par (le roi) dans le domaine de la protection de la foi et de la religion », précise un communiqué de presse.

Confronté à la pression salafiste, victime lui-même d’attentats en 2003 à Casablanca, le royaume chérifien s’est lancé depuis dans un vaste programme de reprise en main de la formation et la gestion même du corps des imams : formation permanente, durcissement des critères de recrutement, création d’un corps d’imams disséminés dans tout le pays et chargés de « l’encadrement » de leurs collègues… S’il a vocation à relever le niveau des imams marocains, le programme signe donc aussi un contrôle accru de la sphère religieuse par le ministère des affaires religieuses.

« Préserver le référentiel religieux »

L’approche a d’ailleurs séduit nombre de pays voisins du Maroc, confrontés eux aussi au fondamentalisme. Le nouvel « Institut Mohammed VI » accueillera ainsi une deuxième promotion de Maliens, mais aussi des imams venus de Tunisie, de Guinée, de Côte d’Ivoire ou même de France.

 

Le programme est fondé « sur l’impératif de préserver le référentiel religieux du royaume » (pour se distinguer du wahhabisme), précise le communiqué, qui y voit « autant de constantes profondément enracinées au Maroc et qu’il partage avec l’ensemble des pays de l’Afrique de l’Ouest ». L’objectif, assumé, est de « préserver le référent identitaire (ndlr : de l’islam marocain) basé sur le juste milieu, la modération et la tolérance et de le prémunir contre les relents de l’extrémisme ».

« Certaines sciences humaines »

Le nouvel édifice, d’une superficie de 28.687 mètres carrés, abrite donc un « ensemble éducatif » qui comprend une mosquée (ouverte au public), des salles de cours, des amphithéâtres, une bibliothèque, et des salles d’informatique. Un « ensemble restauration et résidence » a également été prévu, notamment pour les étudiants étrangers.

Quant au contenu des cours délivrés aux imams étrangers, il prévoit « les fondamentaux des sciences théologiques indispensables à l’imam », des cours de langue (notamment l’arabe), mais aussi « certaines sciences humaines nécessaires », « l’histoire du pays dont l’imam est originaire et ses institutions actuelles ». Des « travaux pratiques » sont également au programme.

Avant l’inauguration du nouvel édifice, les cours étaient dispensés « aux bénéficiaires marocains dans l’ancien siège de Dar Al Hadith Al Hassania », tandis que les étudiants étrangers suivaient leur formation dans « d’autres locaux », en particulier dans un ancien lycée du quartier de Hay Ryad à Rabat.

Cinquante étudiants français

L’Union des mosquées de France (UMF) – relais français du Maroc en France – a obtenu qu’y soient accueillis « une cinquantaine d’étudiants français par an pour une formation d’une durée moyenne de trois ans », indique-t-elle dans un communiqué distinct. « Une première promotion de 22 étudiants, venant de différentes régions de France, est d’ores et déjà sur place. Les 28 autres étudiants les rejoindront en septembre 2015 ».

Bien conscient de l’effet de cette annonce alors que le débat n’a cessé ces dernières semaines sur la nécessité de former en France des « imams de France », Mohammed Moussaoui, le président de l’UMF, indique avoir fait « le choix mûrement réfléchi » de solliciter ce partenariat pour faire bénéficier à ses étudiants d’une « formation théologique d’un haut niveau universitaire ».

L’institut dispensera « des ’formations à la carte’ aux cadres religieux, tenant compte des besoins et des exigences des contextes des différents pays dont sont originaires les étudiants », assure-t-il, précisant avoir « par ailleurs sollicité les pouvoirs publics français pour accompagner cette initiative et permettre à ces étudiants français de bénéficier d’une formation complémentaire centrée sur la sociologie des religions en France, du droit des cultes et de la laïcité ».

 

La Croix

 

F. Achouri

Sociologue.

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