La Grande Mosquée de Paris, qui souhaitait l’obtention par la voie judiciaire d’une dérogation au couvre-feu pour une nuit du mois du Ramadan, n’a pas obtenu gain de cause auprès du Conseil d’Etat. Voici pourquoi.
Il n’y aura pas de dérogation au couvre-feu pour la Nuit du Destin, une date marquante de la fin du mois du Ramadan. Le Conseil d’Etat, saisi par la Grande Mosquée de Paris, a rejeté, jeudi 6 mai, la demande visant à autoriser l’ouverture des mosquées en France dans la nuit du 8 au 9 mai.
Tout en rappelant au préalable que la liberté de culte est « une liberté fondamentale », le juge des référés fait valoir que « cette liberté doit cependant être conciliée avec l’objectif de protection de la santé de la population, reconnu par la Constitution ». Or, « la situation sanitaire demeure préoccupante, avec des indicateurs encore dégradés et un rythme de propagation du virus qui demeure élevé sur l’ensemble du territoire ».
« La mesure de couvre-feu, qui interdit les déplacements des personnes hors de leur lieu de résidence entre 19 heures et 6 heures du matin sur l’ensemble du territoire métropolitain, semble avoir montré son efficacité pour freiner la transmission de l’épidémie », relève le juge des référés.
Par ailleurs, « des mesures alternatives ont été mises en place par de nombreuses mosquées pour permettre un suivi adapté des croyants notamment pour la « Nuit du Destin », avec un service religieux par voie dématérialisée ».
Aucune atteinte manifestement disproportionnée à la liberté de culte
Le Conseil d’Etat relève enfin la difficulté pour les pouvoirs publics de « s’assurer que tous les déplacements dans la nuit du 8 au 9 mars, hors motif impérieux, sont en lien avec la « Nuit du Destin » ». « Le nombre de personnes amenées à se rendre dans une mosquée la nuit du 8 au 9 mai 2021 est estimé à 200 000, ce qui représente des déplacements non négligeables, eu égard à la fragilité de la situation sanitaire », souligne le juge des référés.
« Dans ces conditions, l’impossibilité de se rendre dans un lieu de culte pendant le couvre-feu, y compris pour la « Nuit du destin », ne porte pas une atteinte manifestement disproportionnée à la liberté de culte compte tenu de l’objectif de protection de la santé publique », conclut-il.
Cette décision, similaire à celle prise en mars envers des associations catholiques, va dans le sens prôné par les pouvoirs publics. Dans une note récente transmis aux préfets, le ministère de l’Intérieur a insisté sur le fait qu’« aucune dérogation au couvre-feu ne doit être accordée en plus de celle concernant la prière de l’aube (salat fajr) », accordée au début du mois de jeûne à la demande du Conseil français du culte musulman (CFCM).
Le recteur de la GMP, Chems-Eddine Hafiz, a pris acte de cette décision, appelant désormais les musulmans de France à la respecter : « Pour moi, pour tous les musulmans, la « Nuit du Destin » compte plus que tout mais sa pratique ne peut se faire que dans le respect des règles. La règle a été vérifiée, la règle doit s’appliquer. »