Mosquée de Strasbourg : le bras de fer entre l’Etat et la mairie EELV de Strasbourg se durcit

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Deux semaines après le vote par le conseil municipal de Strasbourg du «principe» d’une subvention de plus de 2,5 millions d’euros pour la construction d’une mosquée, le préfet du Bas-Rhin a annoncé saisir la justice.

 

Bras de fer entre l’Etat et la maire écologiste de Strasbourg : deux semaines après un vote controversé sur le «principe» d’une subvention municipale de plus de 2,5 millions d’euros pour la construction d’une mosquée, le préfet du Bas-Rhin a annoncé le 6 avril saisir la justice afin de faire annuler cette «décision litigieuse». Le vote du conseil municipal du 22 mars avait suscité une vive réaction du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, qui a reproché à la maire (EELV) Jeanne Barseghian de financer une «ingérence étrangère», en l’occurrence celle de la Turquie, sur le sol français. Le ministre a également reproché à la Confédération islamique du Millî Görüs (CIMG), qui porte le projet, de ne pas avoir signé la «Charte des principes de l’islam de France».

«Les échanges de courriers récents» entre le préfet du Bas-Rhin Josiane Chevalier et le maire n’ont «pas permis d’aboutir au retrait de la délibération du conseil municipal», a fait savoir la préfecture, annonçant sa décision de «déférer la délibération litigieuse au tribunal administratif de Strasbourg». «Il s’agit d’obtenir l’annulation de la délibération du conseil municipal dont nous contestons la légalité», a indiqué la préfecture à l’AFP, sans plus de précisions sur les moyens juridiques invoqués. La préfecture rappelle que la subvention, qui devait encore être confirmée par un second vote du conseil municipal, est destinée à la CIMG qui conduit le projet de la Grande mosquée Eyyub Sultan, en cours de construction à Strasbourg.  «La Ville de Strasbourg prend acte du déféré, par la préfète de Région (et du Bas-Rhin, ndlr) Josiane Chevalier, de la délibération relative au principe d’une subvention à la mosquée Eyyub Sultan auprès du tribunal administratif (TA) de Strasbourg», a indiqué peu après la ville dans un communiqué. Le président du futur lieu de culte et de la CIMG Région Grand Est Eyüp Sahin s’est dit «particulièrement affecté» par les «nombreuses accusations» visant son association et son projet. Dans une déclaration de principe endossée par deux autres organisations islamiques, Millî Görüs a proclamé à cette occasion son «adhésion aux principes de la République [et son] rejet de l’influence des Etats étrangers». Selon un sondage Ifop publié ce 7 avril et commandé par le Grand Orient de France, les Français interrogés sont très défavorables au projet de construction de cette mosquée. L’institut de sondage évoque un «cinglant désaveu» et assène : «85% des Français s’y opposent, comme 81% des Alsaciens-Mosellans, 79% des Strasbourgeois et 87% sympathisants EELV.»

Le 1er avril, la mairie de Strasbourg avait indiqué que la décision définitive sur l’attribution de la subvention controversée serait «prise rapidement, en transparence», dans le courant du mois. La ville de Strasbourg avait également indiqué avoir présenté des «exigences» aux porteurs du projet «en termes de solidité du plan de financement et d’adhésion sans équivoque aux principes républicains». La maire, Jeanne Barseghian, a également affirmé dans une lettre à Emmanuel Macron n’avoir reçu jusqu’au 23 mars «aucune alerte» de l’Etat sur Millî Görüs et son projet.

Millî Görüs rejette les accusations d’allégeance à Ankara ou de «séparatisme».

Le Concordat d’Alsace-Moselle autorise les collectivités à financer la construction d’édifices religieux. Millî Görüs a ainsi entretenu des contacts avec l’Etat dans le passé, obtenant en 2020 une «subvention» de 2 500 euros pour une «action caritative» ou nouant avec lui une «convention» pour lutter contre l’insécurité routière. Millî Görüs a également déposé un projet de salle de prière auprès des services de la Ville de Mulhouse (Haut-Rhin). De son côté, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal avait jugé le 1er avril que Millî Görüs allait «à l’encontre des valeurs de la République» et n’avait «pas vocation à organiser des activités, à exister dans la République», sans toutefois annoncer la dissolution de cette organisation. L’association Millî Görüs a pour sa part vivement récusé les accusations, selon elle «infondées», d’allégeance à Ankara ou de «séparatisme», lors d’une conférence de presse le 6 avril. Eyüp Sahin, président du lieu de culte en construction et de la Confédération islamique Millî Görüs (CIMG) Est, a déclaré : «Nous avons été décriés tantôt comme étant des personnes instrumentalisées par des gouvernements étrangers, tantôt comme des personnes qui utilisent la religion pour faire de la politique.» Millî Görüs a toutefois refusé de signer la charte demandée par le gouvernement. Le président de la CIMG France, Fatih Sarikir, s’est défendu : «La Charte provisoire n’a aucune valeur juridique». Eyüp Sahin déclare enfin que le financement du projet de mosquée est «transparent» et que les «accusations d’islam politique sont fausses, infondées».

RT France

F. Achouri

Sociologue.

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