Les femmes dans la mosquée : « Quand les musulmanes contestent, on les ignore »
Que traduit selon vous la manière dont la Grande Mosquée de Paris a géré cette affaire ?
C’est révélateur de la manière dont ils (responsables de la GMP, ndlr) gèrent les besoins des femmes. Ce n’est pas prioritaire pour eux. En définitive, la décision appartient à la direction. Quand les musulmanes contestent, on les ignore. Ensuite, la gestion sécuritaire. Est-on encore dans un lieu de culte lorsque des fidèles nous empêchent de prier dans une salle à moitié vide ? Pendant des décennies, la GMP a autorisé des femmes à prier derrière les hommes, et subitement cela devient un problème.
Le mouvement « Les femmes dans la mosquée » est-il féministe ?
Je ne qualifierais pas le mouvement de féministe. Le point de départ de cette mobilisation est mixte et il s’agit de revenir à une tradition prophétique. Le terme «féministe» est très connoté. Il faudrait le clarifier pour se l’approprier. Si être féministe musulmane signifie revendiquer les droits que l’islam a donné aux femmes, alors tout le monde peut être d’accord avec ce mot. L’islam a été avant-gardiste sur la question des femmes mais l’éthique des textes ne se retrouve pas dans les faits.
S’agit-il selon vous d’un problème culturel avec des cadres religieux étrangers ou diriez-vous que le manque de considération des musulmanes est aussi le fait des Français de confession musulmane ?
Il y a un problème culturel. Beaucoup d’imams viennent de pays où l’on n’a pas conscience des enjeux de société en France. Ils apportent des réponses parfois très néfastes pour les jeunes qui les écoutent. Autre problème, les mosquées ont été bricolées en France. Ils s’agissait souvent de mosquées de fortune qui ont été à un moment donné institutionnalisées mais la place des femmes était secondaire car il s’agissait d’abord d’un environnement exclusivement masculin. L’espace religieux n’a pas été pensé dans son rapport avec la communauté musulmane.
Les musulmanes sont-elles assez présentes sur le terrain associatif pour assumer des responsabilités dans la gestion du culte ?
Les femmes musulmanes sont prête à s’engager mais on ne leur donne pas la parole. Il faut que les responsables de mosquées fassent participer les femmes et les consultent davantage. On les sollicite pour le grand nettoyage, pour préparer des gâteaux mais pour ce qui est de la direction, les femmes sont absentes. On le voit bien dans les institutions musulmanes, au CFCM et dans les CRCM, qui sont majoritairement masculines.
Mais y-a-t-il eu beaucoup de candidatures féminines dans les élections des CRCM par exemple ?
Les hommes avaient procuration pour leur épouse et les candidatures étaient majoritairement masculines ! Il y a un vrai problème car l’espace n’est pas partagé. Les hommes ne peuvent tout de même pas voter pour les femmes ! On en revient donc à la question du droit de vote. Il faut être présentes pour représenter la moitié de la communauté musulmane que sont les femmes.
Zaman France