Racisme: Les actes antimusulmans augmentent en France

L’intolérance à l’égard des musulmans progresserait selon le rapport annuel de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) publié ce mardi. Pour la troisième année consécutive, les actes et menaces antimusulmans progressent (226 faits en 2013 soit +11,3 points par rapport à 2012). Des chiffres qui ne reflètent pas l’ampleur des actes racistes que subissent au quotidien les musulmans, car comme le souligne Christine Lazerges, présidente de la CNCDH: «Peu de personnes portent plainte, car la démarche est difficile et qu’elles ne sont pas toujours bien reçues dans les commissariats.»

Les agressions revêtent différentes formes: «Les femmes se font arracher leur voile dans la rue, les hommes barbus sont l’objet d’insultes. Il y a aussi des gestes menaçants, de courriers injurieux ou des inscriptions insultantes sur les murs», détaille Christine Lazerges. Les régions Ile-de-France, Rhône-Alpes, Languedoc-Roussillon et Nord-Pas-de Calais étant les plus touchées par ces incidents.

Des boucs émissaires en période de crise

Pour expliquer la progression de ce phénomène, Régis de Gouttes, membre de la CNCDH explique tout d’abord que «les Arabo-musulmans de France subissent une double discrimination, à la fois ethnique et religieuse». «Ils sont devenus les boucs émissaires de la société, notamment en raison de la crise», souligne aussi Christine Lazerges. «Dans le Languedoc par exemple, le taux de chômage est très élevé et certains Français stigmatisent les immigrés, dont beaucoup sont musulmans, qui sont accusés de bénéficier de l’assistanat et de coûter cher à la société. Le mot envahissement revient également souvent dans ces discours.»

Les musulmans de France seraient aussi les victimes d’une «libéralisation de la parole islamophobe ces dernières années, sur le Web mais aussi chez les politiques», selon Marc Leyenberger, membre de la CNCDH. «Le débat sur l’identité nationale, les prières de rue et la viande halal pendant la campagne de 2012 ont alimenté la peur de l’islam. Par ailleurs, le fait que la religion musulmane ne soit pas représentée par une personnalité unique et ne possède pas d’organisation hiérarchisée en France participe au brouillage de sa perception chez les Français», renchérit-il.

Le rôle de l’actualité

La défiance vis-à-vis des musulmans se nourrirait aussi des faits d’actualité. Selon le rapport de la CNCDH le rebondissement dans l’affaire de la crèche Baby Loup en 2013 (la cour de cassation avait annulé le licenciement d’une salariée voilée) aurait ainsi été interprété par certains Français comme une atteinte à la laïcité. Les agressions des militaires en France et en Grande Bretagne en 2013 auraient aussi accentué le climat de défiance vis-à-vis des musulmans.

D’où l’importance pour la CNCDH de renforcer l’éducation pour lutter contre les amalgames et les a priori: «Car plus le niveau culturel est élevé, moins on est raciste», conclut Christine Lazerges.

 

20 minutes.fr

Fatima Achouri

Sociologue spécialiste de l’islam contemporain.

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