Il en ressort que cinq groupes vulnérables sont particulièrement touchés par ces discriminations : les migrants extra-européens, les musulmans, les Roms, les Noirs et les femmes issues de l’immigration. Ainsi, en Espagne, les migrants africains sont deux fois plus touchés par le chômage que les Espagnols tandis qu’au Royaume-Uni, les personnes ayant un nom à consonance étrangère ont trois fois moins de chances d’être sélectionnées pour un entretien d’embauche que les candidats ayant un nom typiquement britannique. Même embauchées, ces populations sont plus confrontées à la précarité et à « l’effet plafond de verre » qui les empêchent d’accéder à des postes à responsabilité.
Cliché de la femme voilée « oppressée »
Bon nombre des analyses par pays comme ceux sur la Belgique, l’Autriche, l’Allemagne, la Grèce, l’Espagne ou encore la France le démontrent. Des stéréotypes communément véhiculés renforcent l’image négative des musulmans : les hommes sont perçus comme « arriérés » tandis que les femmes portant le voile sont vues comme « oppressées », est-il noté. Ces clichés ont le vent en poupe dans les pays où le foulard de ces croyantes n’est que très rarement accepté en entreprise.
35 % des employés du privé témoins de discrimination
En octobre 2013, une enquête du Medef révélait qu’afficher ses convictions religieuses sur son lieu de travail est le facteur le plus discriminant aux yeux des salariés français. Le cas de la France semble particulier car, à l’échelle du continent, la majorité (56 %) des Européens estime que l’origine ethnique est le principal facteur de la discrimination au travail, indique l’ENAR.
Dans l’ensemble, le rapport de l’organisation européenne, qui s’est focalisée sur la période comprise entre mars 2012 et mars 2013, fait savoir qu’en 2012, « 35 % des employés du secteur privé et 26 % des fonctionnaires ont signalé avoir été témoins de discrimination au travail » en France.
Faire connaître le Defenseur des droits
« Des indicateurs sur la diversité des origines des employés devraient être établis afin d’aider à identifier la présence ou non de discrimination sur le lieu de travail », propose l’organisation de lutte contre le racisme. « Le gouvernement devrait s’assurer que ces études, telles que l’enquête « Trajectoires et Origines » de l’Ined et l’Insee » qui, par le biais de questionnaires, collectent de telles données, «soient réalisées au moins tous les deux ans », est-il également suggéré.
Une meilleure formation des avocats et des étudiants en droit est recommandée pour permettre à ces derniers de défendre plus facilement les affaires de discrimination au travail, rarement remportées devant les tribunaux. L’ENAR estime par ailleurs que le Défenseur des droits a tout intérêt à mieux se faire connaître du grand public.
Mozaik RH salué
Le grand problème réside dans le fait que les pouvoirs publics agissent peu pour endiguer les discriminations et le racisme dans les entreprises, déplore l’ENAR : « La France manque de politiques publiques ayant pour but de réduire la discrimination ethnique et religieuse au travail. »
En Europe, « ces pratiques discriminatoires continuent malgré l’existence d’une législation européenne interdisant les discriminations dans l’emploi ». Pour la présidente d’ENAR, Sarah Isal, « il est temps que les politiques prennent ce problème au sérieux, d’autant plus que l’accès à un emploi de qualité sera une priorité pour les électeurs – notamment issus de la diversité – aux élections européennes en mai ».
« Discriminer et exclure des individus dans l’emploi mène à une énorme perte de talents et de compétences, de ressources humaines et financières, et a des répercussions négatives sur le progrès et le bien-être de toutes les personnes vivant en Europe », dénonce-t-elle.
En France, le Réseau observe toutefois qu’ici et là, de « bonnes pratiques » pour une plus grande diversité et égalité des chances sont menées comme c’est le cas des « partenariats d’égalités entre les Grandes écoles et lycées situés dans les quartiers socialement défavorisés » et de structures comme Mozaik RH, qui accompagne les jeunes de banlieues dans leur recherche d’emploi ou d’apprentissage.
Il en faudra toujours plus pour éradiquer une discrimination que les gouvernements européens peinent à prendre à bras le corps. En février 2013, plusieurs personnalités comme le chanteur Charles Aznavour ont demandé au gouvernement socialiste la création d’un « grand ministère de l’égalité, de la diversité et de la lutte contre les discriminations ». En vain.
Saphirnews