Approbation d’un texte pénalisant le fait de filmer les soldats israéliens

Les ministres du cabinet ont autorisé dimanche un projet de loi qui criminaliserait les séquences filmées de certaines activités militaires israéliennes et notamment les affrontements entre les soldats et les Palestiniens.

La commission des Lois, qui établit le positionnement de la coalition sur les projets de loi de la Knesset, a voté en faveur de cette proposition malgré l’opposition du procureur général Avichai Mandelblit, qui a indiqué qu’il ne serait pas en mesure de défendre le texte.

Cette législation controversée, parrainée par le parti Yisrael Beytenu avec le soutien du ministre de la Défense Avigdor Liberman, ferait risquer une peine maximale de cinq ans de prison à toute personne attrapée en train de filmer ou de publier des images des activités militaires dans le but de nuire « au moral des soldats ».

Des circonstances plus graves, comme la publication de telles images avec l’intention « d’attenter à la sécurité de l’état », exposeraient à une condamnation pouvant aller jusqu’à 10 ans d’incarcération.

La commission, considérée comme un baromètre essentiel pour évaluer la réussite du texte devant la Knesset, l’a envoyé dans la première étape du processus législatif avec un vote préliminaire prévu mercredi.

Avant le débat de dimanche, néanmoins, des membres de la commission s’étaient entendus dire que la législation pourrait avoir des défis à relever – même une fois adoptée.

Une lettre envoyée aux ministres par Mandelblit a statué que le texte « présente de graves problèmes légaux » et qu’il ne sera probablement pas maintenu par la Cour suprême. Le procureur général a estimé que s’il avançait sous sa forme actuelle, il ne pourrait pas la défendre d’une plainte à la cour affirmant qu’elle serait contradictoire avec les lois fondamentales.

Suite au vote de la commission, une source proche de la coalition a expliqué au Times of Israel que si les législateurs voteront la version actuelle du projet de loi mercredi, des changements seront toutefois institués au cours des délibérations de la Knesset de manière à ce qu’il puisse recevoir le sceau d’approbation du ministère de la Justice.

Cette mesure avait été pour la toute première fois dévoilée le 12 avril, deux jours après que l’armée israélienne a critiqué un soldat qui s’était filmé en train d’encourager un sniper qui était en train de tirer sur un Gazaoui au cours d’un affrontement frontalier.

Cette vidéo avait entraîné une vague de condamnations dans tout le spectre politique, ainsi que certaines justifications et un soutien apporté aux soldats qui y apparaissaient, notamment de la part de Liberman.

Plusieurs incidents survenus ces dernières années dans lesquels les militaires avaient été filmés faisant usage d’une force excessive ou abusant de leur autorité sont devenus un cauchemar pour Israël en termes de relations publiques alors que les ONG affirment que ces images sont vitales pour faire assumer leurs responsabilités aux soldats.

Parmi ces cas, le meurtre, en 2016, d’un attaquant palestinien désarmé et blessé par le soldat Elor Azaria, qui a été reconnu coupable d’homicide involontaire et emprisonné, et un incident, en 2012, durant lequel un militaire avait frappé avec son arme un militant danois au visage.

L’ONG BTselem, qui publie régulièrement des vidéos des mauvais comportements présumés des soldats – et notamment celle qui avait impliqué Elor Azaria – a qualifié le texte « d’inepte ».

« Si le gouvernement est embarrassé par l’occupation, il doit travailler à y mettre un terme. Dans tous les cas, des vidéos de la vie sous l’occupation vont continuer. C’est un fait de la vie qu’aucune proposition inepte de projet de loi ne saura changer », a dit le groupe dans un communiqué.

Daniel Sokatch, directeur-général du groupe pacifique du New Israel Fund, a également fustigé la mesure proposée.

« En Israël comme ailleurs dans le monde, les images de la police et des activités militaires sont devenues un outil important pour les groupes de défense des droits de l’Homme et les médias. Elles font partie de la manière dont les citoyens peuvent tirer la sonnette d’alarme sur d’éventuels actes répréhensibles auprès des autorités », a-t-il dit dans un communiqué.

« Nous avons constaté cela depuis Abu Ghraib jusqu’à l’affaire de Philando Castile. Les tyrans restreignent les droits de filmer ce qui arrive autour d’eux. Ce n’est pas le cas des démocraties ».

 

The times of Israël

Fatima Achouri

Sociologue spécialiste de l’islam contemporain.

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