La Haute Cour du Bangladesh a pourtant donné raison au Procureur Général, Murad Reza, qui s’opposait à cette requête, sur le principe que « la constitution garantit l’égalité des droits pour les citoyens de toute religion, y compris les hindous, les bouddhistes et les chrétiens ». L’Islam reste donc bien religion d’État, ce qui suscite le mécontentement des minorités religieuses du pays, régulièrement sujettes à la pression ou aux violences des islamistes.
Pour le P. Albert Thomas Rozario, avocat et Secrétaire de la Commission ‘Justice et Paix’ de la Conférence des évêques catholiques du Bangladesh, « la Constitution est un document sacré pour une nation ; elle ne devrait pas contenir de message contradictoire. Si la constitution garantit l’égalité des droits quelle que soit la religion des citoyens, alors l’amendement sur la religion d’État doit être déclaré nul. Sinon, cela donne un statut privilégié à l’Islam par rapport aux autres religions », a-t-il déclaré. Selon lui, la Cour Suprême aurait dû appliquer le principe de neutralité, plutôt que de donner raison au gouvernement.
Le gouvernement actuel, dirigé par le Awami League Party, avait pourtant réintégré le principe de laïcité dans la constitution en 2011, en déclarant nul un amendement de 1975 qui avait supprimé la laïcité comme principe constitutionnel. Toutefois, pour des raisons électorales, ils n’avaient pas osé toucher au principe de religion d’État. Il semble que, cette fois-ci, encore, ce soient les raisons politiques et électorales qui aient fortement pesé dans la balance pour maintenir l’Islam comme religion d’État.
En effet, environ 90 % de la population du Bangladesh est musulmane ; 8 % est hindoue, les 2 % restants regroupant les autres religions. On estime que les chrétiens représentent, toutes confessions confondues, environ 1 % de la population, dont une moitié de catholiques.
En visite à Dacca, le Rapporteur spécial des Nations-Unies sur la liberté de religion ou de conviction, a déclaré, le 9 septembre dernier, que « l’extrémisme religieux instaurait un climat de peur parmi les minorités ethniques et religieuses au Bangladesh, notamment chez les chrétiens ». L’instrumentalisation politique de la religion et la montée de l’intolérance religieuse menacent la longue tradition de pluralisme et d’harmonie interreligieuse du pays, a-t-il précisé.
Après avoir rencontré des membres du gouvernement, des parlementaires, ainsi que les représentants des différentes minorités, Heiner Bielefeldt a pressé les autorités de mener des poursuites judiciaires sérieuses, afin que justice puisse être rendue aux victimes de violences ethniques et religieuses. Début 2015, pas moins de trois blogueurs athées, critiques de l’islamisme, ont été sauvagement assassinés.
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