La guerre à l’obscurantisme ?

Après Mme Benghebrit, la nouvelle ministre de l’Éducation nationale, qui affiche une ferme détermination pour engager l’école algérienne dans la modernité et la sortir d’un archaïsme désastreux, voilà que le nouveau ministre des Affaires religieuses et des Wakfs manifeste une grande volonté de travailler pour un islam tolérant, un islam algérien, pratiqué par nos aïeux avant que n’intervienne la politisation du religieux.

Lors du forum de Liberté, mercredi dernier, Mohamed Aïssa a tenu un discours novateur, qui tranche singulièrement avec celui développé par ses prédécesseurs. Avec une franchise qui va ébranler bien des certitudes, il a avancé des idées qui, si elles sont appliquées sans entraves, vont réconcilier tous les Algériens avec leur religion et les inciter à la compréhension de toutes les autres religions.

N’est-ce pas tendre la main au christianisme lorsqu’il dit recevoir «catholiques, protestants, méthodistes, évangélistes, calvinistes» ? N’est-ce retourner aux traditions d’accueil des musulmans algériens lorsque, parlant du représentant de la communauté israélite, il souligne que «c’est un patriote et un nationaliste algérien» ?

De quoi donner une douche froide à certains prêcheurs qui, chaque vendredi, tiennent un discours de haine en stigmatisant «le juif» à tout bout de champ, des propos qui rappellent la sinistre propagande nazie et qu’un homme comme le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, utilise comme prétexte pour humilier et réprimer sauvagement le peuple palestinien. M. Aïssa est conscient des dangers qui guettent le pays par des mouvements sectaires comme le wahhabisme et ses avatars, le salafisme et le takfirisme.

Leurs meneurs, principalement le régime saoudien, veulent maintenir les peuples musulmans dans l’obscurantisme non par amour pour l’islam, mais uniquement pour pérenniser leur pouvoir, comme l’a fait en son temps le chef des Moshishin, qui a donné le mot assassin. C’est d’ailleurs au nom d’une interprétation dévoyée de la religion, voire de sa méconnaissance totale, que des individus au sein du FIS, de l’AIS, du GIA, etc., ont mis l’Algérie à feu et à sang et que d’autres, devenus ministres, volent ouvertement dans les caisses de l’Etat en utilisant la religion comme marchepied.

Le nouveau ministre du culte a la lourde tâche de nettoyer les écuries d’Augias, pourries par des décennies de discours et par des prêcheurs faussaires. Le travail est rude, mais il faut être conscient qu’à lui seul, il ne pourra pas réussir. Il lui faut être épaulé par des institutions solides et des hommes qui croient sincèrement que l’islam est synonyme de tolérance, d’amour, de respect de l’autre, d’ouverture sur le monde. Les Algériens ont été entraînés par des individus sans scrupules dans des aventures sanglantes. Le moment est venu pour un sursaut salvateur.

 

El Watan

Fatima Achouri

Sociologue spécialiste de l’islam contemporain.

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