Les chauffeurs de taxis musulmans de New York concilient prière et travail

Que serait New York sans ses emblématiques taxis jaunes que l’on croise ou l’on hèle sur les avenues huppées comme dans les ruelles plus ordinaires, au volant desquels les visages métissés des chauffeurs reflètent le cosmopolitisme d’une mégapole unique, parmi lesquels un grand nombre de musulmans, originaires du Moyen-Orient, d’Afrique et d’ailleurs, conduisent chaque jour leurs clients à bon port.

Des conducteurs très scrupuleux, tant professionnellement que religieusement, qui s’acquittent de leur mission avec la même rigueur qu’ils observent les cinq piliers de l’islam, relevant chaque jour que Dieu fait un défi de taille : se mettre en quête d’un lieu salubre et adéquat, sans troubler l’ordre public, afin de se prosterner devant Allah selon un rituel immuable, alors qu’ils naviguent à vue, sans savoir où leur itinéraire du jour les mènera.

Munis de leur précieuse boussole hig tech qui leur indique la bonne direction, La Mecque, sur leur iPhone, les chauffeurs de taxis musulmans de Big Apple sont loin de perdre le nord quand l’heure de la prière a sonné. Qu’il pleuve ou qu’il vente, tous déplient méticuleusement leur tapis de prière où qu’ils se trouvent, les uns à l’abri, à l’arrière de stations service, de garages ou de restaurants aux saveurs d’Asie du Sud-Est, qui sont la propriété de coreligionnaires et amis, les autres, pris de court, devant une bouche d’incendie ou sur un parking, bravant les intempéries, les aléas de leur halte obligatoire, et les tarifs exorbitants de certains stationnements…

« La prière commence à 13 heures », a précisé Youssef Kamal à un journaliste monté à bord de son véhicule pour le suivre au cours de ses pérégrinations du jour. En ce vendredi de la grande prière commune, riche en récompenses, ce dernier recherchait désespérément un emplacement pour se garer depuis 12h45. « Maintenant, il est 1h15. Je vais m’arrêter à la station d’essence pour effectuer ma prière, mais cette prière n’aura pas la valeur de celle effectuée en commun et en présence d’un imam« , regrette-t-il.

Unis dans le recueillement, les taxis drivers de confession musulmane le sont aussi dans la transmission des bons tuyaux, et c’est à celui qui communiquera aux autres fidèles, en temps et en heure, l’adresse la plus proche, la plus sûre, la plus propre, où s’incliner en paix devant le Très-Haut au cours d’une parenthèse spirituelle enchantée, loin de l’agitation frénétique de la ville.

« C’est un moment unique entre vous et Dieu, on pourrait le comparer à une réunion à ne manquer sous aucun prétexte. Si vous avez une réunion avec votre patron, que feriez-vous s’il vous disait de venir à 8h du matin ou à 20 h ? Vous obéiriez, vous vous empresseriez de prendre un taxi ou le métro, vous voleriez pour arriver à temps à ce rendez-vous obligatoire. C’est la même chose pour nous », a confié Youssef Kamal, en se livrant à une analogie très évocatrice pour la ruche bouillonnante du business qu’est la « Cité qui ne dort jamais ».

Oumma.com

 

F. Achouri

Sociologue.

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