Lors de la commémoration des victimes de la Shoah, dimanche 6 septembre, le grand rabbin Haïm Korsia a mis en regard la situation de ces réfugiés avec celle des juifs persécutés pendant la Seconde Guerre mondiale.
« Nous devons être les Saliège et les Théas, les Trocmé et les Boegner de notre temps », a affirmé le grand rabbin Haïm Korsia, rappelant les responsables chrétiens qui s’étaient alors levés pour la dignité des juifs.
Au cours de la traditionnelle cérémonie à la mémoire des victimes de la Shoah, dimanche 6 septembre à la grande synagogue de la Victoire, à Paris, le grand rabbin de France Haïm Korsia a employé des morts forts pour appeler la France à un « sursaut civique et humain » en faveur de « ces réfugiés qui affluent depuis des mois dans des conditions insupportables vers les terres européennes, fuyant la guerre, la pauvreté, la souffrance indicible ».
Si la cérémonie instaurée au lendemain de la Seconde guerre mondiale dans la semaine précédant le nouvel an juif est d’abord l’occasion d’honorer la mémoire des 6 millions de juifs assassinés pendant la Seconde guerre mondiale, le grand rabbin de France n’a pas oublié l’actualité.
« Aujourd’hui, il nous faut agir »
« Le mal n’est jamais loin de nous, car il est aussi en nous. Comment ne pas évoquer les maux qui rongent aujourd’hui notre monde ? », s’est-il interrogé avant de revenir sur les attentats de janvier qui ont particulièrement éprouvé la communauté juive mais aussi les manifestations du 11 janvier au cours desquelles, « la société, trop longtemps muette et passive, est sortie de son silence apeuré ou complice (et) s’est massivement levée pour affirmer sa détermination à vivre en fraternité ».
« Aujourd’hui, il nous faut agir, a-t-il lancé. Agir pour lutter, dans un front uni, contre le terrorisme et tous ceux qui instrumentalisent et dévoient la religion pour tuer au nom de Dieu, d’où qu’ils viennent et quels qu’ils soient. Agir, pour ne laisser personne au bord du chemin de la vie. »
« La France ne peut fermer les yeux sur ces femmes et ces hommes »
« Quel engagement pouvons-nous prendre pour les minorités persécutées d’Orient ?, s’est alors demandé le grand rabbin de France. Quelles actions en faveur des migrants, ces réfugiés qui affluent depuis des mois dans des conditions insupportables vers les terres européennes, fuyant la guerre, la pauvreté, la souffrance indicible ? »
Soulignant que « la France, terre d’asile et d’accueil, la France, berceau des droits de l’homme, ne peut fermer les yeux sur ces femmes et ces hommes qui échouent aux portes de nos frontières, avec pour seul espoir, celui de vivre », le principal responsable religieux juif français n’a pas hésité à mettre en regard la situation de ces réfugiés avec celle des juifs persécutés pendant la Seconde Guerre mondiale.
« Nous devons être les Saliège et les Théas, les Trocmé et les Boegner de notre temps »
Et c’est en reprenant les mots mêmes du cardinal Jules Saliège, archevêque de Toulouse, qui, en 1942 s’était élevé contre le sort fait aux juifs dans la France occupée, que le grand rabbin de France Haïm Korsia a appelé à un « sursaut civique et humain » : « Les juifs sont des hommes, les juives sont des femmes ».
Rappelant les responsables catholiques et protestants qui s’étaient alors levés pour la dignité des juifs, le grand rabbin Korsia a conclu son discours en affirmant que « nous devons être les Saliège et les Théas, les Trocmé et les Boegner de notre temps et dire, en mémoire de nos disparus et en fidélité avec nos valeurs : “Les migrants sont nos frères en humanité” ».
Le grand rabbin de France a aussi annoncé que les dirigeants des grandes organisations de la communauté juive se retrouveront prochainement pour donner corps au précepte biblique : « Tu aimeras l’étranger comme toi-même, car tu as été étranger en terre d’Égypte » (Lévitique 19, 34).
La Croix