La capitale portugaise devient le siège de l’Imam Aga Khan, chef spirituel de la communauté ismaélienne.
« Le Portugal est un pays dont la vision pluraliste a marqué l’histoire et se vérifie aujourd’hui encore grâce aux rôles prépondérants que le pays joue à l’ONU, à l’Unesco ou au sein de la communauté européenne. » Le prince Karim Al-Hussaini dit Karim Aga Khan IV, imam des Ismaéliens, a rendu, mardi 10 juillet, un hommage appuyé au Portugal, qui l’a reçu avec les honneurs d’État.
Lisbonne va désormais être le siège de l’Imamat. Jusqu’à présent, les Ismaéliens, branche dissidente des chiites, disposaient d’une dizaine de représentations dans le monde, cette communauté étant elle-même présente dans 30 pays. C’est à l’occasion du soixantième anniversaire de son intronisation comme imam des musulmans ismaéliens que l’Aga Khan s’est rendu sur les bords du Tage pour une visite considérée comme officielle.
L’Aga Khan dispensé de l’impôt immobilier
En effet, en 2015, le prince Aga Khan et l’État portugais ont signé un accord qui a fixé les règles de l’établissement de la représentation diplomatique ismaélienne à Lisbonne. Outre l’immunité diplomatique et la protection accordées aux chefs d’État ou de gouvernement, l’accord concède de nombreux avantages fiscaux.
L’Aga Khan sera ainsi dispensé de l’impôt immobilier, un cadeau de poids quand on sait qu’il a dépensé 12 millions d’euros pour l’achat du palais Mendonça, en plein centre de Lisbonne, pour y installer l’Imamat et sa Fondation. La restauration de cet édifice qui date de 1909 est évaluée à 6 millions d’euros. Les donations et les legs seront exonérés d’impôts, tous comme les salaires et les biens divers, comme le parc automobile. En revanche, les revenus d’affaires ne seront pas détaxés.
Si, en tant que chef spirituel, l’imam est chargé d’interpréter le Coran et d’en faire respecter les préceptes, il doit aussi faire fructifier les biens qui lui sont confiés. Les Ismaéliens reversent à l’Aga Khan la dîme prélevée sur leurs biens. En contrepartie, le prince a créé le Réseau Aga Khan pour le développement, chargé de construire et gérer des écoles, des universités, des hôpitaux et divers projets de développement. Ce réseau emploie 80 000 personnes, et il sera désormais géré depuis Lisbonne.
Le Portugal bénéficiera des largesses de l’Aga Khan
La capitale portugaise qui dispose depuis 1998 d’un centre de culte et de réunions, compte 7 000 Ismaéliens. Venus du Mozambique, originaires d’Inde, ce sont des lettrés, commerçants habiles, qui ont fui l’ancienne colonie portugaise au moment des troubles de la guerre d’indépendance en 1975. Aujourd’hui, la nouvelle génération est propriétaire d’entreprises diverses, de chaînes d’hôtels et de réseaux de boutiques vestimentaires. Cette intégration remarquable permet à l’Aga Khan de disposer d’un solide réseau dans le pays.
La communauté ismaélienne dite Nizarite, une mystique née au XIe siècle, est l’une des plus influentes aujourd’hui. L’imamat lisboète, « Saint-Siège » de ce culte musulman, devrait attirer de nouveaux ismaéliens, intéressés par « les opportunités » d’investissements qu’offre le Portugal. Quant au Portugal il bénéficiera des largesses de l’Aga Khan, qui envisage de créer un lycée et a investi 10 millions d’euros dans la science et la recherche portugaises.
La Croix