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Ces chiffres accablants sur la pauvreté en France

Selon le rapport 2014 du Secours Catholique, « la situation des plus pauvres ne s’arrange pas » en France et le manque de mobilité entraîne des difficultés d’accès à l’emploi.

 

 

Manque de transports ou absence de voiture, un facteur aggravant de la pauvreté (THIERRY ZOCCOLAN / AFP)      L’absence de moyens de transport est « un facteur aggravant de la pauvreté », dénonce le Secours catholique dans son rapport 2014 publié jeudi 5 novembre sur la situation de ses bénéficiaires, dont une part de plus en plus importante ne dispose d’aucune ressource. « La situation des plus pauvres ne s’arrange pas », remarque Bernard Thibaud, délégué général du Secours catholique. Pour les personnes aidées par l’association en 2014, « le niveau de vie médian a péniblement augmenté de 35 euros en 4 ans » pour s’établir à 535 euros par mois, soit « quasiment à la moitié du seuil de pauvreté 2013 », déplore-t-il. La quasi-totalité (96%) des 1,425 million de personnes accueillies en 2014 (dont 662.200 enfants) vivent en dessous de ce seuil de pauvreté. Parmi elles, 18% ne disposent d’aucune ressource (+2 points par rapport à 2013). Il s’agit en majorité de migrants, récemment arrivés ou sans statut, ou de personnes qui ont renoncé à faire valoir leurs droits (au chômage, au RSA, etc.). Plus de la moitié (58%) ont des impayés, souvent de logement ou d’énergie, pour un montant médian de 800 euros.

Une majorité (69%) est au chômage, et seulement 4% ont accès à une formation professionnelle, qui constitue pourtant « une protection contre la perte d’emploi ou la persistance du chômage« , note le rapport. Autre « très gros frein de retour à l’emploi », les problèmes de mobilité, ajoute Bernard Thibaud. Selon une enquête auprès de 4.355 bénéficiaires, le manque de mobilité entraîne des difficultés d’accès à l’emploi, un manque d’accès aux soins, des difficultés administratives, un manque de choix dans l’alimentation, et un manque de loisirs et de culture. Il entraîne aussi un sentiment d’isolement et une « perte de courage ». Pour les plus précaires, « c’est la double peine », analyse Bernard Thibaud. « Ils habitent davantage dans des lieux reculés en raison des coûts de logement, et se retrouvent éloignés des lieux d’embauche, avec des transports en commun plus limités et moins accessibles ».

Opportunités d’emploi « loupées »

C’est le cas de Marie, 37 ans, qui habite dans un petit village isolé du Loir-et-Cher avec ses deux enfants et son conjoint, à 30 km d’une « grande ville ». Sans travail et sans permis, elle a fait une formation dans la restauration, l’obligeant à prendre chaque jour le seul car disponible, à 06H30, pour une formation qui commençait à 09H00. « L’été ça allait, mais en hiver, j’attendais dans le froid », se souvient Marie, qui essaie de passer son permis, mais « c’est devenu très cher ». Le Secours catholique lui a financé une partie de ce budget. « J’attends de l’avoir pour trouver du travail en restauration. J’ai déjà postulé, mais souvent c’est pour les services de midi et du soir, et sans voiture je ne peux rien faire. J’ai loupé des opportunités à cause de ça. »

« A la veille des élections régionales, nous souhaitons que les conseils régionaux prennent davantage en compte les publics fragiles », demande Bernard Thibaud, réclamant avec « un meilleur accès aux tarifications sociales », une meilleure information des trajets et un service plus fréquent en dehors des heures de pointe. Selon l’enquête, 56% des bénéficiaires de moins de 60 ans n’ont pas de voiture. L’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale a estimé que pour un revenu de 1.000 euros, le budget voiture était de 300 euros par mois.

Lorsque le conjoint de Marie a perdu son permis pendant quatre ans, la situation s’est compliquée. « Une amie m’emmenait une fois par mois faire les courses. » La famille s’est aussi mobilisée. Avec 940 euros par mois (RSA de son conjoint et prestations sociales) et un faible loyer en HLM, « on s’en sort bien, toutes les factures sont payées », dit Marie. Mais pas d’extras. « Ce qui m’ennuie, c’est de devoir toujours dire non aux enfants. »

 

Challenges/ AFP

 

 

Fatima Achouri

Sociologue spécialiste de l’islam contemporain.

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