Religion musulmane: qui sont les imams de Belgique?

Il y a environ 300 imams dans notre pays. Leur rôle est très important car ces guides religieux sont aussi des conseillers auprès des membres de leur communauté. Qui sont-ils? D’où viennent-ils et quelle est leur vision de l’islam?

 

Le représentant des imams turcs insiste: pas d’ingérence de l’Etat belge dans les affaires religieuses.  Nous nous sommes rendus un vendredi dans une mosquée marocaine bruxelloise où de nombreux fidèles sont venus assister à la prière et au sermon de l’imam Salam Hicham. Ce jour-là, il insiste sur la tolérance et la paix. « Il faut vivre en paix avec ses voisins et avec tous ceux qui ne sont pas de notre religion… où les hommes se regardent en frères et pas comme des bêtes féroces« , leur dit-il notamment.

Qu’ils soient d’origine arabophone ou turque, la majorité des imams en Belgique guide leurs fidèles vers l’ouverture aux autres. Pour Cem Kocyigit, Imam de la Dyanet (organisme turc), « Étudier l’Islam avec la tradition nous montre la fraternité, la paix et le vivre ensemble« .

Des statuts différents

Sur environ 300 imams en Belgique, seuls 85 sont reconnus et rémunérés par l’État fédéral. Certains sont bénévoles et reçoivent des dons des fidèles et d’autres encore sont rémunérés par l’état turc. En 2008, Cem Kocyigit est parti durant quatre ans étudier à la faculté de théologie d’Ankara. Car tous les imams turcs de la Diyanet sont formés en Turquie où ils suivent en général durant cinq ans une formation universitaire spécifique.

Pour Coskun Beyazgül, responsable de la Diyanet, il est important de connaître le pays dans lequel on va exercer cette fonction: « La culture, la langue, les autres minorités ou encore les religions prédominantes« .

Une vision de l’islam parfois non adaptée au mode de vie européen

Les imams venus de Turquie ou encore du Maroc n’ont pas tous une connaissance approfondie du contexte belge. Beaucoup sont d’origine rurale et ne parlent pas le français. Certains ont parfois une vision de l’islam, non adaptée au mode de vie européen. L’imam d’une mosquée turque de Charleroi, Adnan Delaglioglu, explique qu’il est né en Belgique et connaît bien le pays. Mais, dit-il, « Quelqu’un qui n’a pas vécu ici ne peut pas connaitre les problèmes et avoir la sensibilité du jeune qui vit ici « . L’imam d’une mosquée marocaine dira même : « On n’a plus besoin d’imams venus de l’étranger car ils ne connaissent rien du tout de la société belge« . Pour Salam Hicham, « L’imam doit être formé ici et prêcher le juste milieu et l’ouverture« .

Les imams étrangers : un frein à l’intégration ?

Certains imams peuvent rester sous l’influence d’États étrangers et être un frein à l’intégration. Depuis quelques années, les autorités belges s’interrogent justement sur la formation des futurs imams en Belgique. Le président de l’exécutif des musulmans de Belgique, Nouredinne Smaili n’est pas contre cette idée, mais il estime qu’ils doivent donner eux-mêmes cette formation avec une aide . « Je ne suis pas contre une collaboration avec les universités sur le terrain « . Le représentant des imams turcs n’est pas contre non plus. Mais il insiste aussi : pas d’ingérence de l’État belge dans les affaires religieuses quel que soit le culte. « Nous sommes pour, à condition que les musulmans soient les acteurs principaux et que l’État belge vienne en soutien moral et financier dans le cadre d’une initiative propre aux musulmans « , précise Coskun Beyazgül.

Quelques mosquées non officielles sous surveillance

En attendant, sur le terrain, quelques mosquées non officielles ou autres lieux de prières, font l’objet d’une surveillance accrue par les services de police et de renseignements, pour s’assurer que, dans ces lieux, aucun individu n’incite au terrorisme. La communauté musulmane elle-même est sur ses gardes. « Jusqu’ici nous n’avons recensé aucun radicalisme émanant des mosquées. Tous les problèmes connus proviennent de recruteurs extérieurs, que ce soit via internet, dans des salles de sports, etc.« , précise Nouredinne Smaili. Coskun Beyazgül insiste également sur le fait que tous les imams qui viennent en Belgique sont suivis rigoureusement par la Diyanet.

Les mosquées et leurs imams ne sont pas des viviers de terroristes. Et la majorité des imams prônent un islam modéré. Mais certains imams importés manquent d’une formation théologique et sociale adaptée au mode de vie européen ce qui peut freiner l’intégration de certains musulmans.

 

RTBF.be Info

 

Fatima Achouri

Sociologue spécialiste de l’islam contemporain.

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