Le ministre de l’intérieur, Manuel Valls, l’assurait encore mercredi 17 juillet lors de la rupture du jeûne du ramadan, à la mosquée de Paris. « N’ayons pas peur de nos lois, elles sont faites pour construire l’apaisement. » Pas sûr que ces propos convainquent les 200 à 400 habitants de Trappes (Yvelines) qui ont manifesté leur colère, dans la nuit de vendredi à samedi 20 juillet, contre l’application, jugée violente, de la loi de 2011 interdisant le voile intégral dans l’espace public.
Une même exaspération s’était emparée de quelques dizaines de personnes, à Argenteuil (Val-d’Oise), en juin, à la suite d’un contrôle similaire qui avait dégénéré. Dans un souci « d’apaisement », le maire, Philippe Doucet, avait demandé une enquête sur les conditions d’intervention de la police et reçu des représentants de la communauté musulmane. Depuis l’entrée en vigueur de cette loi, 661 verbalisations ont été établies, selon le ministère de l’intérieur, qui assurait dans le récent rapport d’étape de l’Observatoire de la laïcité : « Si quelques rassemblements hostiles mobilisant peu d’individus ont pu être constatés, l’application de la loi s’effectue, dans la grande majorité des cas, sans recours à la contrainte et sans occasionner de trouble à l’ordre public. »
A la suite des incidents de Trappes, le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), une association militante qui apporte une aide juridique aux victimes d’agressions antimusulmanes, a appelé « la police nationale à remplir sa mission de protection de la population plutôt que de l’agresser » et plaidé pour une « relation de confiance et de respect mutuels ». Souvent critique sur le traitement par la police et la presse de ce type d’affaires, le Collectif, qui a publié le témoignage de la femme contrôlée sur son site, a aussi lancé un appel à témoins « pour que les agresseurs ne restent pas impunis et que la victime ne se retrouve pas sur le banc des accusés ». Relayant « l’inquiétude » d’une partie de la communauté, le CCIF a interpellé le ministre de l’intérieur, « incapable de mettre un terme à cette déferlante islamophobe qui touche la France depuis des mois ».
« ATTAQUES RÉPÉTÉES »
Cet amalgame entre les contrôles de musulmanes en infraction pour port du voile intégral et les agressions de femmes voilées, effectivement répertoriées dans plusieurs villes de France ces dernières semaines (deux à Argenteuil, plusieurs plaintes à Reims ou tout récemment encore une plainte à Trappes) ne tient pas. Mais, de manière unanime, les associations musulmanes relèvent « un climat » et « une libération de la parole islamophobe ».
Lors de la rupture du jeûne, mercredi, l’Observatoire de l’islamophobie, relevant du Conseil français du culte musulman, a fait état de « huit agressions en quinze jours ». Son président, Abdallah Zekri, dénonce depuis plusieurs semaines « des attaques répétées contre les musulmanes de France » et s’inquiète de « la colère et de l’indignation qui montent dans la communauté » face à « la lâcheté de ces actes ». Il fait état d’une nouvelle hausse significative des actes islamophobes répertoriés dans le rapport qu’il doit publier dans les prochains jours. Le ministre de l’intérieur, Manuel Valls, s’est ouvertement inquiété de cette montée des violences.
Source : Le Monde.fr